Les Émissaires d'Imladris
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I Amarthan

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Message par Laegwing Mer 26 Oct - 2:50

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Mauvais présage


Une fraîche et belle matinée se levait sur Imladris. La rosée perlait sur les arbres continuellement parés de couleurs d'automne, tandis que la Soleil illuminait de ses rayons obliques les eaux de la Bruinen, ornant celle-ci d'une multitude d'étincelles blanches et brillantes. Le vent était doux, porteur de parfums délicieux. Une matinée des plus agréables pour tous les Elfes de la vallée. Presque tous, du moins.

Laegwing était assise sur une chaise de sa chambre, très droite comme à son habitude. Elle caressait la tête du jeune loup qu'elle avait recueilli dans la Vieille Forêt, Faradêl, assis à ses pieds. Il avait atteint une taille imposante désormais, et sa fourrure anciennement gris pâle avait presque tourné au blanc ; seule l'échine portait des poils légèrement plus sombres. Il fixait sa maîtresse de ses grands yeux d'ambre, les oreilles couchées ; visiblement, la bête avait senti que quelque chose n'allait pas.

En effet, l'exilée sylvaine avait le regard incroyablement absent, comme si son esprit avait délaissé son corps pour vagabonder au loin. De plus, elle était immobile et froide comme une statue de glace. Son regard de jade, ordinairement si brillant et vif, semblait un peu terne, et était tourné sans ciller vers le ciel visible par la fenêtre. C'était un tableau tant étrange qu'inquiétant pour quiconque connaissait Laegwing.

Camaen et Aellend, ses jumeaux âgés de trois ans, jouaient tranquillement dans un coin de la chambre. Si cette tranquillité était coutumière à la petite Elfe, pour son frère, c'était chose rare. Il regardait de temps à autres sa mère, visiblement perturbé.

Quelques coups doux sur la porte brisèrent ce silence de plomb, et Laegwing tourna la tête, le regard à peine plus présent.


- Entrez, invita-t-elle d'une voix effacée.


La porte s'ouvrit, laissant place à une Elfe blonde à l'allure douce, la nourrice des jumeaux. Laegwing la salua d'un léger signe de tête et un sourire aussi effacé que le reste.


- Suilad, Hiril Laegwing, fit la nourrice avec un sourire plein de chaleur. Eh bien ! Quel calme !
- Suilad, Maelleth. Un calme à la mesure du temps gris, j'imagine.


Maelleth fixa un instant Laegwing d'un air surpris, avant de tourner machinalement la tête vers la fenêtre, par laquelle on pouvait clairement apercevoir les doux rayons de la Soleil.


- Hiril... la matinée est superbe.


Laegwing reporta son regard sur la fenêtre et fronça les sourcils, apparemment troublée par ce qu'elle voyait.


J'ai du être trop plongée dans mes pensées, finit-elle par répondre avec un sourire qu'elle s'efforça de rendre plus vivant. Je vais vous laisser avec les enfants.

Elle se redressa et s'approcha de sa progéniture pour l'embrasser tendrement ; cette étreinte sembla ramener un peu de couleurs à l'Elfe, mais aussitôt qu'elle cessât, le terne revint. Elle s'éclipsa ensuite dans une pièce adjacente, où elle ôta sa longue robe verte ornée de brunes feuilles d'automne, qu'elle remplaça par une tenue de sentinelle, adaptée aux déplacements rapides, à la discrétion et au tir à l'arc. Puis elle revint dans la chambre.


- Je vous souhaite une bonne journée, Maelleth. Non, Faradêl, reste ici, ajouta-t-elle alors que le loup se relevait pour la suivre.


Elle finit par quitter ses appartements, sous le regard d'une inquiétude à peine voilée de la nourrice que Laegwing ne remarqua pas. En sortant de la Dernière Maison Simple, elle récupéra ses armes : ses deux fameux sabres et un long arc fin accompagné d'un carquois bien rempli. Sa traversée de la vallée se fit d'un pas lent, trop lent pour ses habitudes. Les citadins avaient coutume de voir sa démarche vive et prompte, à la fois brusque et féline, et toujours déterminée ; jamais cette allure traînante.

Elle traversa le val vers le Sud et entama l'ascension du col, jusqu'aux Portes. Elle marcha encore un peu et s'arrêta aux racines d'un haut arbre qu'elle escalada. Il y avait déjà quelques temps qu'elle avait proposé au Seigneur Elrond ses services de sentinelle, quand rien d'autre ne l'occupait, car elle détestait par-dessus tout rester oisive. Mais aujourd'hui, si elle surveillait les environs avec la même attention apparente qu'à l'accoutumée, son esprit était bien ailleurs.

Cela faisait plusieurs jours qu'une ombre avait recouvert son cœur comme un voile lourd, sans qu'elle n'en sache la raison ni la cause. Le temps lui paraissait gris, brumeux, et elle sentait où qu'elle aille un vent froid et morbide courir derrière elle. Son regard était continuellement tourné vers le Nord, et une angoisse mystérieuse la rongeait de l'intérieur comme une créature perpétuellement affamée.

Elle soupira sur sa branche ; et ce soupir flotta dans les airs comme un appel désespéré. L'impulsive guerrière d'Eryn Galen s'était laissée atteindre par un mal étrange qui semblait la vider de son essence et de sa légendaire fougue, à la plus vive surprise des Elfes de la vallée.

Peut-être que les jours à venir allait lui et leur dire pourquoi.

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Message par Laegwing Ven 28 Oct - 23:51

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Brume sanglante



Un pas après l'autre.


Dans le plus grand silence, elle avançait.


Un pas après l'autre.


Fondue dans son environnement, nul ne l'avait remarquée.


Stop.


Laegwing était tapie entre des buissons de houx, et, avec des gestes bien mesurés, encocha une flèche sur son long arc de chasse sylvain. Face à elle, des Orques riaient grassement autour d'un feu de camp sur lequel rôtissait ce qui semblait bien être un humain. Elle les fixa un moment d'un regard haineux, puis banda son arc. Sa flèche, avec son empennage caractéristique teint en vert, était pointée en direction de la nuque du plus massif, qui était sans aucun doute le chef, car tous les autres riaient à ses dires.


Le chef en premier, toujours.


Dans un sifflement aérien, le projectile transperça avec force la nuque de l'Orque, qui rendit son dernier soupir putride dans un immonde gargouillis. Les autres le regardèrent bêtement pendant quelques secondes, éberlués ; ces secondes furent fatales à deux d'entre eux, qui, côte à côte, reçurent un tir doublé. Laegwing eut le temps d'en abattre encore deux autres avant que le reste du groupe ne la repérât. Avec rapidité et grande habitude, elle remit son arc dans son dos et dégaina ses deux sabres, dont les lames brillaient d'une vive lumière nacrée sous la lumière de la Lune.


Cîllang. Cyllwaedh.


Elle esquissa un sourire avant de se jeter dans la mêlée. Jamais elle ne se sentait plus elle-même que lorsque ses épées prolongeaient naturellement ses bras. Et, avec grâce et sauvagerie mêlées, l'acier tourbillonna dans une danse mortelle, dernier jugement des immondes créatures.


« Im Liltharhethil. »


Une gorge fut tranchée, puis une deuxième dans le même mouvement. Une tête affreuse roula à terre dans un ultime rictus répugnant.


La brume au-dessus d'elle se teintait de rouge.


Une poitrine se fit transpercer, rapidement suivie de deux ventres. Puis une nouvelle gorge ouverte acheva la danse.

Avec un calme dérangeant, la guerrière essuya ses armes sur la végétation et les rengaina, avant d'observer le théâtre de ses exécutions. Un sang immonde coulait sur l'herbe. Elle enjamba quelques cadavres et ôta les cinq flèches qu'elle avait tiré, puis les nettoya à leur tour et les remit dans leur carquois. Sa brume persistante, qui lui cachait les Étoiles, redevint d'un gris terne et froid. L'adrénaline du combat laissa de nouveau sa place à l'angoisse mystérieuse de mauvais augure.


« Quoi qu'il advienne, il n'y a pas de raisons de désespérer tant que brillent les Étoiles. Car c'est pour nous qu'elles ont été placées dans le Ciel, et l'espoir demeurera aussi longtemps qu'elles luiront. »



Mais tout était gris aujourd'hui, et elle ne voyait plus les œuvres d'Elbereth. Elle n'avait trouvé d'autre moyen de soulager sa crainte que se battre.

Un cri d'oiseau retentit dans les airs et elle s'arracha à ses sombres pensées pour en chercher la provenance. Un beau faucon au plumage clair tournait : c'était Ithil, l'oiseau-messager des siens. Elle siffla et tendit le bras sur lequel il vint lentement se poser en décrivant quelques cercles. Laegwing détacha le parchemin roulé accroché à une de ses pattes et lut rapidement les quelques mots inscrits à la hâte par le Seigneur Elrond :


« Laegwing, veuillez au plus vite revenir à Imladris. »


Elle fronça les sourcils et mit le parchemin dans une poche de sa cape, puis renvoya Ithil avant de faire demi-tour, sans un dernier regard pour les Orques massacrés, ni l'humain dont la chair, lentement, noircissait sur les flammes.

____

Quelques notes : "Cîllang" et "Cyllwaedh", noms des épées de Laegwing, signifient respectivement "Épée du Renouveau" et "Porteuse de Serment". Quant à "Liltharhethil", c'est le surnom le plus répandu de Laegwing, que l'on peut traduire par "Dansent-lames".

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Message par Laegwing Lun 31 Oct - 18:31

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Naufrage


Un regard, et un autre, et d'autres encore ; Laegwing se demanda pourquoi elle suscitait tant de coups d'œil des citadins d'Imladris, avant de se rendre compte des tâches de sang qu'elle arborait, dont la couleur jurait affreusement sur ses vêtements verts. Nul doute que les Elfes d'ici voyaient rarement revenir un des leurs couvert de sang.

Avec la plus grande indifférence face aux grimaces, tantôt un peu dégoûtées, tantôt réprobatrices, elle avança vers la Dernière Maison Simple. Un Elfe à l'entrée vint la prévenir qu'elle était attendue à la Salle du Feu. Elle le remercia d'un signe de tête, et remit ses armes aux gardes, avant de décrocher son serre-tête en argent de sa ceinture et le poser sur ses cheveux.

Son pas se fit plus lent à mesure qu'elle approchait de la Salle, et l'angoisse monta de plus belle. Elle ignorait pourquoi on l'avait fait mander – ou plutôt, elle s'attendait à certaines choses, mais en chassait vivement la pensée. Elle demeura quelques instants immobile devant les portes menant à sa destination, pour retrouver son calme et son masque d'impassibilité, puis pénétra dans la Salle du Feu.

Elle repéra rapidement celle qu'elle considérait comme sa sœur, Isthiriel, ainsi que son compagnon Mânfael, tout près des flammes à l'autre bout de la pièce ; avec eux se trouvait un Elfe qu'elle ne connaissait pas, et qui était très certainement celui qui apportait des nouvelles. D'un pas lent, elle avança dans la pièce. Son visage n'avait aucune expression particulière, mais son teint était blafard et ses yeux vitreux avaient pris une couleur gris terne qu'on ne lui avait jamais vu.


- Dame Laegwing ? Demanda l'Elfe en inclinant poliment la tête. (Il était assez grand et bien bâti, et des cheveux noirs tombaient sous ses épaules. Une mine épuisée trahissait un long voyage et des épreuves récentes.) Je suis Seledhros.


La guerrière hocha la tête, tant pour acquiescer que pour saluer les trois personnes, tout en retirant ses gants tâchés de sang.


- J'ai fait aussi vite que possible pour remonter d'Eregion, dit-elle d'une voix oscillant entre la froideur et l'effacé. Peut-on savoir ce qu'il se passe ?


À côté d'elle, Isthiriel, au teint également très pâle, fixait l'Elfe inconnu. Dans un murmure tremblant, elle souffla :


- Le Forochel. Une mauvaise nouvelle du Forochel.


Laegwing lui adressa un coup d'œil entendu. Cela faisait quelques temps déjà qu'elles avaient senti une menace venant du Nord.


- Vous devriez vous asseoir, toutes deux, invita Seledhros en désignant le banc près des flammes.
- Je préfère rester debout, rétorqua la sylvaine, tandis que sa sœur secouait la tête en signe de refus. (Mânfael, de temps à autres, jetait à celle-ci quelques coups d'œil soucieux.) Faites vite.


L'Elfe brun hésita un instant avant de reprendre la parole.


- Comme vous l'aviez si justement pressenti, je rentre du Forochel. Et les nouvelles que j'apporte risquent de vous faire un choc. D'où mon invitation à vous asseoir.


Malgré ses efforts pour garder un visage imperméable, on ne pouvait que remarquer le déglutissement de Laegwing, et son teint encore plus blafard.


- Nous nous attendions à cela depuis des jours, fit Isthiriel. Je ne sais pas si nous sommes prêtes, mais en tout cas, nous l'avons senti. Et nous nous y sommes préparées.
- Ne tournez pas autour du pot, lança la sylvaine de manière lapidaire, visiblement à bout.


Seledhros prit une inspiration avant de se lancer.


- Une mission avec d'autres compagnons nous a amenés à naviguer dans les mers du Nord, commença-t-il. Mais une violente tempête nous a surpris... et notre bateau a fait naufrage au large du Forochel. (Il marque un temps d'arrêt avant de poursuivre.) J'en suis... j'en suis le seul rescapé. Parmi les naufragés... se trouvaient des nommés Neldoron, Gilgaladrim et Fingoldel.


C'était un masque de neutralité soigneusement élaboré au fil du temps qui venait de se briser en mille morceaux sur le visage de Laegwing. Toute impassibilité avait disparu pour laisser sa place à une horreur figée. Sous le choc, elle laissa tomber ses gants ensanglantés, tandis qu'Isthiriel se raccrochait à Mânfael pour que ses jambes devenues soudainement faibles ne l'abandonnent pas.


- Je suis désolé, ajouta Seledhros avec une expression peinée et sincèrement compatissante.
- Ce n'est pas vrai. Ce n'est pas possible. Vous devez vous tromper, fit Isthiriel dans une intonation tremblante.
- Vous mentez, rétorqua brusquement Laegwing d'une voix rauque, brisée.

Face au silence poliment surpris de son interlocuteur, Laegwing s'approcha de lui et le prit par le col ; elle le souleva de quelques centimètres du sol avec une force qui étonna grandement Seledhros.

- Vous mentez ! Répéta-t-elle plus fort. Dites-le ! Dites-moi que vous mentez !
- Laegwing ! S'exclama sa sœur de cœur.


Mânfael délaissa quelques instants sa compagne pour poser avec douceur sa main sur celle de Laegwing, l'incitant à laisser l'Elfe en paix.


- Quel intérêt aurais-je à le faire, Dame … ? demanda Seledhros d'une voix douce, quoique légèrement étranglée.


La guerrière défit sa poigne d'acier et recula de quelques pas mal assurés. L'information commençait à s'insinuer en elle, doucement, comme un poison qui fait son chemin dans les veines avec une lenteur sadique. Fingoldel et Gilgaladrim. Son compagnon, père de ses enfants, et celui qu'elle avait fini par considérer comme son père, son guide. Deux parmi les personnes les plus importantes de sa vie. Comme d'autres avant, ils s'en étaient aussi allés.

C'était une malédiction. Ce ne pouvait être que cela.

Des larmes adamantines creusèrent leur triste lit sur ses joues blêmes. La douleur commençant à la saisir avec violence, elle se courba légèrement en portant une main à son cœur. Le serre-tête ailé en argent que lui avait offert Gilgaladrim, tomba à terre, comme pour confirmer la nouvelle, ultime présage d'un funeste destin.

Après cela, elle ne se rendit guère compte de ce qu'il se passait. Elle avait la sensation d'une étreinte, le souvenir de son serre-tête et ses gants ramassés à terre, et d'être allée avec ses deux amis au bord de la Bruinen pour se reprendre. L'eau fraîche lui fit prendre conscience d'une chose : jamais, jamais elle ne pourrait demeurer ici à se ronger l'esprit dans les jours à venir. Et elle refusait purement d'accepter la nouvelle. Après le choc vint le déni. Elle prit la décision de voyager jusqu'aux terres glacées et désolées du Forochel, et de n'en repartir qu'après avoir eu la certitude que les deux Elfes de son cœur avaient bien péri en mer – ou non.

C'est en toute hâte qu'elle rassembla quelques affaires, le strict minimum. Dans sa précipitation, elle heurta une étagère de laquelle tomba une pierre de jade brute, non taillée. Elle se souvenait de cette pierre : Gilgaladrim la lui avait envoyée un jour, en lui disant qu'elle lui rappelait ses yeux. C'était donc un des derniers souvenirs qu'elle avait de lui. Elle se demandait ce qu'elle pouvait en faire pour honorer sa mémoire – et en portant son regard sur le serre-tête, elle su.

Faradêl, le loup, pénétra dans la pièce en la fixant d'un regard intelligent. Laegwing comprit que la bête n'allait pas la laisser aller où que ce soit sans elle, aussi elle prit de quoi le couvrir des vent glacés des terres du Nord. Elle acheva son paquetage par des rations de voyage.

C'est avec sa précipitation coutumière qu'elle quitta ses appartements, le loup à sa suite. Toutefois, elle se heurta à Isthiriel et Mânfael, qui venaient de pénétrer la Dernière Maison Simple. Aucun des deux n'était toutefois assez sot pour l'empêcher de partir ; ils avaient parfaitement compris, et Laegwing n'en attendait pas moins d'eux. Ils voulaient juste s'assurer qu'elle était prête pour son voyage.

Elle leur fit promettre de veiller sur ses enfants jusqu'à son retour ; puis elle remit à Mânfael son serre-tête et la pierre de jade, en lui demandant de trouver un bon joaillier pour sertir le joyau.

Promesses et étreintes échangées, l'heure du départ vint. Elle récupéra ses armes à l'entrée, et préféra son arc de chasse à son arc de guerre, plus utile dans sa situation. Elle laissa la vallée derrière elle sans l'ombre d'une hésitation. Prête à parcourir maintes et maintes lieues à la force de ses jambes – sa monture n'était pas adaptée pour les grands froids, elle n'en demandait pas mieux pour s'occuper l'esprit et éviter une torture mentale trop conséquente. Faradêl, dans son indéfectible fidélité, la suivrait où qu'elle aille.

Mais la brume était toujours là, et le chemin devant elle serait long et dangereux.

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Message par Laegwing Mar 1 Nov - 21:34

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Les hurlements des loups


Rouge-Brun-Or, Rouge-Brun-Or.


Les feuilles d'éternel automne du col d'Imladris dansaient dans un ballet hypnotisant, qui engourdissait la pensée, concentrant celle-ci uniquement sur le jeu des couleurs tourbillonnantes.


Rouge-Brun-Or, Rouge-Brun-Or.


Elles virevoltaient dans une valse parfaite avec le vent, qui ne se lassait pas de les faire tourner, tourner encore.


Rouge-Brun-Or, Rouge-Brun-Or.


La Trouée des Trolls était vraiment une terre qu'affectionnait Laegwing : sauvage, abrupte, imprévisible, un peu à son image. Si elle avait précipité son départ, elle voyageait en prenant son temps – ou tout du moins un peu moins vite qu'à l'accoutumée, dans une façon inconsciente de retarder l'échéance. Ou peut-être de s'apaiser l'esprit. Elle observait la région d'un œil nouveau, s'imprégnant de tous les détails qu'elle pouvait rencontrer, tandis que ses jambes avançaient par automatisme sans qu'elle n'ait besoin de les guider. Faradêl, lui aussi, profitait pleinement du voyage, fourrant son museau gris-blanc un peu partout où il le pouvait.

La descente du col était aussi ardue que son ascension. Les pentes étaient traîtresses, brusques, parfois glissantes, et la végétation touffue et les pierres parsemées n'aidaient pas la progression. Mais le pas de Laegwing était sûr et expert, et savait habilement éviter les obstacles pour avancer en économisant le plus possible d'énergie. Elle s'arrêta au bord d'un haut précipice, duquel elle avait une vue imprenable sur le reste du col et le Gué. Ainsi perchée, elle pouvait encore mieux apprécier la chaude chorégraphie des feuilles jouant avec les fortes bourrasques.

Elle reprit rapidement sa descente, en observant la vie grouiller sur ces pentes montagneuses. Elle entraperçut un magnifique lynx au pelage fauve juché sur un rocher, avant qu'il ne disparût dans les broussailles. Au-dessus d'elle, les oiseaux se joignaient parfois aux feuilles dans leur danse avant de poursuivre leur vol. Au fur et à mesure que la matinée avançait, tout devenait encore plus vivant, et Faradêl ne savait plus où donner de la truffe.

C'est vers midi qu'elle atteignit le Gué de la Bruinen. Les eaux cristallines s'étendaient sur un très large lit, rafraîchissant l'air. Faradêl ne se fit pas prier pour se jeter à l'eau, s'abreuver de tout son saoul et, surtout, patauger et s'ébrouer. Ses pitreries parvinrent à arracher un sourire à Laegwing, qui se félicita de l'avoir amené avec elle : il serait une grande source de réconfort.

Le reste de la journée se déroula tranquillement. De temps à autres, la sylvaine repérait un voyageur (égaré ou non), et s'empressait de se camoufler dans la végétation ou derrière de hauts rochers pour ne pas se faire remarquer. Elle était fort bien seule et ne souhaitait pas s'encombrer de discussions protocolaires et inutiles.

Le soir tomba, et Laegwing su qu'il était temps de faire une pause en voyant Faradêl marcher doucement à ses côtés, au lieu de trottiner partout. Elle s'installa sur une hauteur des Gorges, entre un haut arbre et un tout petit point d'eau ; elle ne prit pas la peine d'allumer un feu de camp, profitant simplement de la douce pénombre. Elle grignota quelques rations en attendant le retour du loup, parti chercher quelque chose à manger, lui aussi. Il ne tarda pas à revenir avec un petit lièvre dans la gueule, qu'il entreprit consciencieusement de dévorer. Laegwing observa les crocs déchirer la fourrure pour atteindre la chair, avant d'arracher celle-ci par lambeaux sanguinolents et filandreux.

L'Elfe s'adossa contre l'arbre en fixant droit devant elle, se reposant à la manière des siens. Un tourbillon vague de pensées s'insinuait en elle sans qu'elle ne s'en rende réellement compte. Le loup, lui, était allongé sur le flanc tout près d'elle et profitait d'un sommeil bien mérité.

Toutefois, un long hurlement vint briser la quiétude nocturne, ce qui arracha Faradêl à son repos et Laegwing à ses pensées. Tout deux tendaient les oreilles, et un autre hurlement retentit alors, un peu plus loin, puis un autre encore. Une meute de loups ! Les deux compagnons se redressèrent vivement. La sylvaine suivit la provenance des hurlements et s'arrêta au bord d'un haut précipice. Elle savait que la meute se trouvait dans la zone boisée en contrebas.

Quand un autre hurlement retentit, Faradêl ne put résister et se mit à faire de même. Les cris cessèrent alors, et Laegwing craignit que la meute ne cherche à pourchasser l'intrus qui s'était introduit sur leur territoire. Mais force était de constater qu'elle avait d'autres priorités : une petite dizaine de loups se rassemblèrent dans une région aux arbres bien plus clairsemés, à portée vue de l'Elfe. Ses vives oreilles lui permirent de capter une partie de la subtile palette de grognements, gémissements et autres aboiements des loups qui communiquaient entre eux.

Et soudain, tout s'anima : la meute avança brusquement, et, plus loin, délogea un troupeau de daims qui paissaient ou dormaient paisiblement. Laegwing observa le spectacle avec fascination, s'attardant sur la cohésion du groupe, ses signaux, ses embuscades ; tout ceci fonctionna à la perfection, car, bientôt, un grand daim fut attrapé.

À ses côtés, Faradêl gesticulait et semblait se retenir de se montrer à nouveau peu discret. Elle posa une main sur sa tête pour l'apaiser. En contrebas, un premier loup, sans aucun doute le mâle alpha, goûta à la proie, bientôt suivi par un deuxième qui était certainement sa femelle. Puis le reste du groupe vint lui aussi profiter du repas.

Le spectacle terminé, Laegwing fit demi-tour jusqu'à son « camp » avec Faradêl pour reprendre le repos là où elle l'avait laissé. Des pas très lourds, suivis de grognements du loup la tirèrent à nouveau de sa méditation une heure plus tard ; se redressant avec prudence en récupérant ses armes, elle ne tarda pas à apercevoir une ombre massive venir vers eux, une trentaine de mètres plus loin.

Un troll.

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Message par Laegwing Mer 2 Nov - 15:04

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Combat



Un troll.


Laegwing esquissa une grimace. Faradêl gronda de plus belle... ce qui ne manqua pas d'attirer l'attention de l'imposante créature, qui commençait déjà à avancer rapidement vers eux dans un bruit sourd.

L'Elfe mena le loup dans des fourrés, où elle lui demanda de ne pas bouger. Puis elle se jucha avec toute l'agilité des siens dans un arbre, sur une branche hors de portée du troll. Celui-ci se trouvait déjà sur leur campement, et se dirigeait vers le loup dont les grognements l'avaient alerté, son hideuse face menaçante. Faradêl se tapit dans ses fourrés en grondant dissuasivement (et vainement) de plus belle, tous crocs dehors, le poil hérissé ; et le troll semblait content d'avoir un loup pour manger.

Soudain, Laegwing poussa un sifflement long et strident qui déchira l'air et détourna l'attention du troll, qui leva la tête vers elle : erreur. Deux flèches étaient encochées sur son immense arc, et aussitôt qu'il leva la tête, elle vinrent se planter dans sa gorge. Le monstre poussa un cri sourd et arracha les flèches de son cou, couvrant celui-ci d'éventuels nouveaux projectiles. Il se dirigea vers l'arbre et commença à malmener celui-ci. Avec sa force, Laegwing ne doutait pas qu'il finirait par l'arracher, aussi sauta-t-elle rapidement sur le dos de la créature et lui tira rapidement une nouvelle paire de flèches dans la tête avant qu'il ne réagisse. Sa fureur et sa douleur le firent gigoter dans tous les sens, ce qui empêcha l'Elfe de tirer à nouveau à l'arc. Elle laissa tomber celui-ci à terre et dégaina ses épées en tâchant de maintenir son équilibre sur les épaules de la bête. Mais force était de constater que ce troll était une vraie furie, elle ne put que lui taillader le cou avant de devoir continuer le combat à terre.

Finalement, une Elfe pour le repas, ce devait être meilleur – c'est sans doute ce qui traversa l'esprit du troll en voyant la cause de sa douleur. Furieux, il tenta d'abattre sa lourde massue sur elle. Laegwing esquiva sans problème, un sourire étiré sur ses lèvres. L'excitation du combat guérissait son mal, et elle commençait à voir la brume au-dessus d'elle se dissiper un peu, lui révélant quelques belles étoiles, ce qui la rendit d'autant plus redoutable. L'adrénaline était à Laegwing ce que l'alcool était aux humains : une manière momentanée d'oublier ses peines, une drogue temporaire qui la faisait se sentir mieux, et qu'il fallait sans cesse reprendre.

En quelques pas vifs, elle fut entre ses jambes, qu'elle taillada de ses lames pour rendre la démarche et l'équilibre du troll moins certains. Le troll tenta de l'écraser ; elle se mit à courir autour de lui, pour l'épuiser et raviver ses plaies. La créature stupide persista à vouloir bêtement l'attraper et commença rapidement à montrer des signes de fatigue. C'est le moment que choisit Laegwing pour rengainer ses lames et courir à toute vitesse récupérer son arc et se jucher sur un arbre pour reprendre son activité première ; les flèches étaient bien plus efficaces que ses épées.

Elle siffla à nouveau pour attirer son attention, ce qui, bien entendu, fonctionna encore. Une paire de flèches vint s'enfoncer dans les yeux de la créature, ce qui lui arracha un horrible hurlement. L'Elfe grimpa rapidement sur de plus hautes branches, et, sans laisser le temps au monstre de se remettre, lui décocha de nouvelles flèches sur la tête. Puis elle sauta à bas de l'arbre, et tira un ultime projectile dans la poitrine.

Ceci signa la fin du troll, qui, avec une tête ahurie et parfaitement stupide, tomba en arrière et s'écrasa au sol dans un tremblement de celui-ci.

Avec toujours le même calme qui lui était coutumier, la redoutable combattante s'approcha du cadavre pour tenter de récupérer quelques flèches. Elle avait amené un beau stock avec elle, bien sûr, mais il lui fallait en économiser le plus possible car le voyage serait long. Les plus récupérables furent consciencieusement nettoyées.

Faradêl, une fois le combat terminé, sorti prudemment de ses fourrés et vint renifler la créature. Laegwing lui fit une caresse derrière les oreilles. Son sourire ne tarda pas à se dissiper en même temps que son adrénaline, car la brume revenait progressivement.


- Viens, Faradêl, dit-elle au loup. Je crains que le vacarme du combat n'ait attiré d'autres trolls. Je suis parfaitement capable d'en abattre un, mais en affronter plusieurs en même temps, c'est une autre histoire.


Elle rassembla hâtivement ses affaires avant de s'éloigner avec son compagnon. Ensemble, ils arpentèrent des routes sinueuses où ils ne risqueraient pas de rencontrer de trolls. Faradêl suivait l'Elfe sans broncher, mais quelques bâillements occasionnels indiquaient qu'il aurait bien voulu dormir un petit peu plus longtemps. Laegwing se promit de faire une pause quand la Soleil serait haute afin de ne pas épuiser le loup, puis une autre en soirée. Pour le moment, il leur fallait juste se hâter d'atteindre une zone sûre avant l'aube.

Au petit matin, elle atteignit tout juste la partie Ouest de la Trouée, plus dégagée et aussi plus sûre que l'orientale. Il n'y avait guère de trolls par ici, et, de toute manière, la Soleil venait de se lever ; aussi ralentit-elle la cadence – au grand soulagement de Faradêl. Elle profita de croiser un point d'eau pour faire une courte halte, car à mesure qu'elle avançait vers l'Ouest, l'eau se faisait plus rare. Toutefois, le loup ne semblait pas bien décidé à repartir, allongé paresseusement qu'il était au bord de l'étang. Laegwing fut bien contrainte de prolonger sa pause.

L'interruption de son voyage la fit replonger dans ses pensées plus tumultueuses que des eaux sombres agitées par le vent. Elle avait hâte que s'achève son voyage autant qu'elle le redoutait. Elle craignait par-dessus tout ce qu'elle découvrirait à son terme. La brume au-dessus d'elle, qui n'était pas décidée à s'estomper, ne lui laissait rien augurer de bon.

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Message par Laegwing Jeu 3 Nov - 23:38

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Mésaventure


Le reste de la traversée de la Trouée se passa dans une relative tranquillité. Laegwing avait ralenti le pas, car elle n'était pas vraiment pressée d'atteindre les Terres Solitaires, qui étaient loin d'être sa région préférée. Aussi profita-t-elle pleinement des derniers miles de cette contrée sauvage et dense en végétation, tout comme son compagnon à quatre pattes.

Ils ne rencontrèrent aucun autre problème, si ce n'est un ours avec lequel Faradêl eut très envie de se confronter. Elle du faire appel à tous ses talents pour calmer tant le loup que l'ours, car elle ne désirait pas abattre inutilement ce dernier (qui, après tout, n'avait rien demandé à personne).

Aucun autre troll ne vint troubler leur nuit – ils étaient peu nombreux à l'Ouest, et Laegwing avait redoublé de vigilance pour les éviter au mieux. Ils en profitèrent pour voyager dans la pénombre et la quiétude nocturne qu'ils affectionnaient tous deux.

C'est au petit matin qu'ils laissèrent derrière eux les feuilles d'automne et atteignirent le Dernier Pont qui enjambait la Mitheithel, la Source Grise. Ce pont, situé sur la Grande Route de l'Est, était d'ailleurs l'unique voie pour traverser ce fleuve. Laegwing n'avait pas voulu emprunter cette route directe qui reliait les Havres Gris à Imladris, car elle avait préféré éviter un maximum de voyageurs ; mais la contrée désolée au-delà du Pont n'offrirait pas vraiment d'abri aux regards, ainsi compta-t-elle suivre ce chemin tracé pour les miles à venir.

Avant de traverser, elle fit une halte au bord de la Mitheithel, car l'eau serait très rare par la suite. Elle fit boire Faradêl de tout son saoul, et remplit ses outres autant qu'elle le put. Elle en profita aussi pour se baigner – après avoir vérifié qu'il n'y aurait pas d'yeux indiscrets pour la voir. La fraîcheur de l'eau la débarrassa de la sueur du voyage et la rendit plus disposée à traverser les Terres Solitaires. Elle avala quelques rations et offrit des morceaux de viande séchée au loup. Puis, après avoir jugé qu'elle s'était suffisamment attardée comme cela, elle franchit le Dernier Pont.

La sentinelle sylvestre traîna plus que de raison au-delà du fleuve, sur les derniers tapis de végétation : elle voyait déjà les collines arides au loin. Elle n'avait pas souvent traversé cette région à pieds, et elle se souvint pourquoi elle tenait tant à prendre une monture quand elle se déplaçait ; bien sûr, la première raison était une question de rapidité. Mais la deuxième était qu'elle avait réellement une sainte horreur de passer trop de temps aux Terres Solitaires.

Au fur et à mesure qu'elle progressait dans la région, la chaleur montait. Si, comme tous les Elfes, la sylvaine supportait très bien les écarts de température, il n'en allait pas de même pour Faradêl dont la langue semblait vouloir atteindre le sol. L'inconfort du loup empêchait Laegwing d'aller vers l'Ouest le plus rapidement possible, car il fallait ménager ses forces, l'eau était très rare. Cet inconfort étant le même pour sa monture lorsqu'elle voyageait à cheval, elle savait très bien où se trouvait le point d'eau le plus proche, aussi s'efforça-t-elle de faire accélérer le pas à Faradêl pour l'atteindre le plus rapidement possible.

En attendant, le paysage restait désespérément le même : une terre sèche, âpre, aride, qui montait et déclinait en collines poussiéreuses. Quelques arbres dépérissant venaient parfois sombrement décorer les saillies et offrir un maigre ombrage. Et cette journée-là, il n'y avait pas le moindre souffle de vent.

En début de soirée, Laegwing atteint finalement les collines surplombant les marais d'Harloeg. Ils ne constituaient pas vraiment la meilleure source d'eau qu'il soit, mais celle-ci restait assez fraîche par endroits. Elle entraîna son loup à un point où l'eau était un peu moins stagnante et où il pourrait se rafraîchir à loisir – ce qu'il ne se priva pas de faire avec bonheur. Ils firent tous deux une courte halte avant de reprendre le voyage.

Laegwing aperçut à la fin de la nuit les ruines caractéristiques qui ornaient le sommet d'une large colline, et qui servaient d'habitation à ceux que l'on nommait les Eglain, les Abandonnés. Elle hâta le pas, car le point d'eau suivant ne se trouvait pas loin. Elle tâcha au mieux d'éviter les yeux des hommes qui vivaient ici, ce qui, à l'approche d'Ost Guruth, n'était pas chose aisée. En effet, beaucoup profitaient de la fraîcheur de l'aube naissante pour se dégourdir les jambes et prendre une bouffée d'air.

En faisant un petit détour, elle put atteindre la petite oasis des Terres Solitaires : un creux au cœur de vielles ruines humaines et empli d'une eau pure et cristalline, qui n'avait rien à voir avec celle d'Harloeg. Le loup s'y plongea à nouveau en buvant de grandes lampées, tandis que l'Elfe y remplit ses outres. Elle ôta également la capuche de sa cape, libérant sa chevelure d'écorce, et se mouilla abondamment le visage et la nuque.

Un tout petit bruit léger qui froissa des herbes sèches alerta son ouïe, et elle se retourna vivement, apercevant rapidement une silhouette toute menue cachée derrière un tronc, deux seaux à côté d'elle. Une petite fille des Eglain. Visiblement, celle-ci avait eu peur en voyant l'Elfe, et surtout le loup. Celui-ci était trop occupé à s'ébrouer et faire le fou pour avoir remarqué l'enfant.

Laegwing hésita, puis tendit la main en direction de la fillette pour encourager celle-ci à s'approcher, ce qu'elle fit d'un pas hésitant après avoir récupéré ses seaux. Elle observa le loup avec crainte, puis l'Elfe avec émerveillement.


- Tu es bien jeune pour sortir seule, fit Laegwing en ouistrain. (La petite resta silencieuse quelques instants, intimidés, avant de répondre.)
- Maman est malade, dit-elle d'une voix fluette. Elle a de la fièvre. Alors je suis allée chercher de l'eau.


Elle montra ses seaux. La sylvaine esquissa un pâle sourire en voyant la dévotion de l'enfant envers sa mère, et l'aida à remplir ses seaux, sous le regard intrigué du loup ; Faradêl s'avança vers la fillette pour la renifler, et celle-ci recula vivement de quelques pas.


- Ne t'inquiète pas, la rassura Laegwing. Il ne te fera aucun mal.
- Il est à toi ? Interrogea craintivement l'enfant.
- Il est avec moi.


La petite fille ne sembla pas vraiment saisir la nuance.


- Tu m'aides à rapporter les seaux ? Ils ont l'air lourds.


Laegwing marqua une hésitation.


- Je ne crois pas que ce soit une bonne idée, finit-elle par répondre. Les tiens n'ont pas l'habitude de voir des Elfes, et Faradêl – elle désigna le loup de la main – risque, comme toi, de les effrayer.
- Oh, mais ne t'inquiète pas ! S'exclama avec enthousiasme la fillette. Tu n'auras qu'à mettre ta capuche, et pour le loup, je leur dirai qu'il est gentil et qu'il faut pas lui faire de mal.


Laegwing fut à nouveau indécise, puis finit par hocher doucement la tête et rabattre sa capuche, dérobant à nouveau sa chevelure et son visage aux regards. L'enfant lui fit un grand sourire, tandis que l'Elfe vint prendre les seaux, qui, au bout de ses bras, semblaient très légers. Elle avait toujours eu du mal à résister aux enfants, qu'ils fussent humains ou non, et c'était avec eux qu'elle se montrait la plus douce. Cette pensée lui fit songer à ses propres jumeaux, et elle eut un pincement au cœur à l'idée de les avoir laissés derrière elle pour un temps : elle s'en voulait, et ils lui manquaient déjà.

Elle suivit la petite jusqu'à Ost Guruth, et entreprit avec elle, et le loup à ses talons, de grimper les hautes marches qui y menaient. Elle imagina aisément la peine qu'aurait eu la jeune Eglan à en faire l'ascension avec deux poids trop lourds pour elle, et admira d'autant plus l'amour qui la liait à sa mère.

Elle regretta cependant légèrement d'avoir accepté de l'aider en pénétrant dans la ville : les regards des gardes et de tous ceux qui s'étaient éveillés tôt l'incommodèrent. Elle était une bien étrange visiteuse, si grande de taille (géante pour une humaine), si imposante, si lourdement armée, et un carnivore derrière elle. Elle ne manqua toutefois pas de noter que certains semblaient parfaitement avoir compris qu'ils n'étaient pas de la même race, tandis que les moins vifs d'esprit étaient juste très étonnés et curieux, se demandant de quelle lointaine contrée venait cette incroyable étrangère.

La petite fille rassurait les siens, leur disant qu'il s'agissait d'une amie, et que le loup était « avec elle ». Elle mena ensuite l'Elfe jusqu'à une ruine à l'intérieur de laquelle elle pénétra. Une femme d'âge mûr, pâle comme la mort et visiblement souffrante, était allongée sur une couche, le visage en sueur. La fillette s'approcha d'elle, et avec l'aide de l'eau des seaux, lui épongea tendrement le front.

Laegwing l'observa un moment avant de froncer les sourcils en entendant Faradêl couiner. Elle baissa les yeux vers lui : il était allongé sur le sol et semblait mal en point. Il avait de temps en temps quelques soubresauts du ventre et agitait parfois nerveusement les pattes. Elle lui toucha la truffe : celle-ci était très sèche.

La sylvaine était très préoccupée de l'état de l'animal. Qu'avait-il ? Il était en pleine forme, ne serait-ce qu'une heure auparavant, lorsqu'il pataugeait follement dans l'eau.


L'eau...


Elle tourna vivement la tête vers la petite fille qui s'apprêtait à faire boire un bol d'eau fraîche à sa mère.


- Ne lui fais pas boire cela ! S'écria-t-elle, se retrouvant en deux grandes enjambées auprès d'elle, et lui prenant le bras.


L'eau des ruines était sans doute empoisonnée.

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Message par Laegwing Dim 6 Nov - 18:53

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Source


La petite fille regarda Laegwing sans comprendre, mais le regard sans appel de l'Elfe lui fit cesser son geste ; elle arborait malgré tout un visage interrogateur et perplexe. La sylvaine pointa alors Faradêl du doigt, qui gémissait toujours, et la fillette comprit soudain, et regarda sa mère d'un air horrifié.

Laegwing pesta sur son manque de vigilance. Elle détacha sa sacoche de sa ceinture, et la vida avec empressement sur le sol. Elle contenait toutes sortes de fioles et de plantes qui traitaient divers poisons, et qu'elle récupérait auprès de guérisseurs confirmés. Cela faisait près de quinze ans qu'elle ne se déplaçait jamais sans cela. Depuis ce fameux jour.

Elle chassa vivement ce souvenir avec une grimace. L'important était qu'elle soit apte à éliminer le poison dont souffrait Faradêl. Elle examina le loup, en tâchant de se remémorer les conseils et indications des guérisseurs, afin de pouvoir lier les symptômes à un remède. Elle n'était absolument pas experte elle-même dans l'art du soin, sa vocation guerrière l'en empêchant. Elle ne connaissait que les bases : bandages, sutures et plantes et remèdes les plus basiques, le strict minimum à connaître lorsqu'elle patrouillait en Forêt Noire avec les siens, afin de pouvoir intervenir à tout moment.

Après quelques instants d'hésitation où elle fit appel à sa mémoire, elle prit finalement une petite fiole emplie d'un liquide vert pâle. Elle se saisit de la gueule du loup et lui écarta les mâchoires, puis lui remonta sa tête et maintint celle-ci fermement. Elle déboucha la fiole et commença à verser le liquide dans la gueule de l'animal, crispée dans sa concentration, désireuse de respecter les dosages. Elle le fit finalement avaler et respira un grand coup.

La fillette s'approcha du loup, une moue inquiète sur son visage rond. Elle glissa ses petites mains dans son pelage gris-blanc.


- Il va aller mieux ? Questionna-t-elle.
- Je l'espère, répondit Laegwing, incapable de deviner si son remède était le bon.


L'Elfe rangea son fouillis dans sa sacoche, qu'elle rattacha à sa ceinture. Puis, de ses bras forts, elle se saisit le plus délicatement possible de Faradêl.


- Tu pars déjà ? Demanda la fillette, tout en écarquillant les yeux en voyant la sylvaine porter aussi facilement l'imposant animal.
- Je n'ai pas à rester ici, dit simplement Laegwing.


En vérité, elle ne supportait pas l'idée de devoir attendre dans ce camp humain que Faradêl aille mieux.


- Adieu, et prends soin de ta mère. Pour l'eau... tu ferais mieux de demander aux tiens.


Elle sortit ensuite de l'habitation, et traversa le camp d'un pas rapide, le loup dans les bras, en tâchant d'ignorer totalement les regards éberlués des Eglain qu'elle croisait. Elle marcha un moment dans les broussailles avant que ses bras ne commencent à devenir douloureux ; elle fit alors halte dans un bosquet, où elle posa délicatement Faradêl.

Plusieurs jours passèrent alors, où elle s'occupa de son mieux du loup, en lui offrant l'eau de sa propre outre, et quelques morceaux de viande séchée. Au bout de trois jours, son compagnon allait beaucoup mieux, et il commençait à se déplacer sans problème. Ce n'est que le lendemain que sa forme revint complètement et qu'il reprit la route aux côtés de Laegwing.

Celle-ci n'avait presque plus d'eau dans ses outres, et le prochain point était encore loin, d'autant plus qu'il lui demandait de faire un large détour jusqu'au Nord du Mont Venteux. Elle pressa alors la cadence.

Le mont fut visible dès le lendemain soir. Laegwing admira cette hauteur tristement couronnée de ruines, qui veillait de sa majesté les landes arides qu'elle surplombait et auxquelles elle offrait une rare ombre. L'Elfe n'en détacha guère son regard, car dans ce paysage répétitif, la montagne sautait aux yeux, et, dans sa fierté, réclamait toute l'attention des voyageurs. La Soleil qui se couchait derrière elle apportait un peu de couleur et de noblesse à sa sombre couronne, l'entourant d'un halo rougeâtre.

Le relief se faisait plus abrupt autour de la montagne, et le pas moins sûr. Les montées se succédaient aux descentes, et les descentes aux montées, inlassablement, et la soif rendait la progression plus difficile. En longeant le mont par l'Ouest, Laegwing découvrit une toute petite cascade qui jaillissait des roches et se déversait dans un point d'eau minuscule. Elle ne l'avait encore jamais vue, mais c'était une bonne surprise : ils pourraient boire bien plus tôt que prévu.

Elle savait que cette eau ne pouvait être empoisonnée par les orques de la région : elle continuait sans doute sa route sous terre, et la cascade qui se déversait continuellement des roches la renouvelait constamment. Le loup s'y précipita avec bonheur, et Laegwing n'hésita pas non plus, buvant largement et renouvelant ses réserves.

Abreuvés, les compagnons firent une bonne halte bien méritée au bord de cette source inespérée, profitant de celle-ci pour récupérer de la fatigue du voyage et manger un peu. Ils se reposèrent toute la journée, et reprirent leur voyage une fois la nuit tombée. Laegwing savait que si cette partie de la région était la plus agréable, grâce au Mont Venteux et à la rivière au Nord, elle était aussi plus dangereuse car les Orques et les Gobelins l'avaient investie, aussi marcha-t-elle prudemment, en se fiant à ses sens et ceux de Faradêl. Plusieurs fois, ils tombèrent sur des camps de ces immondices. L'Elfe égorgea même un éclaireur gobelin dans les broussailles, délogé par un grognement du loup.

En début d'après-midi, ils atteignirent finalement les gorges au Nord, et leur rivière qui allait se déverser dans les marais du Pays de Bree. Laegwing su que leur voyage allait être à partir de maintenant bien plus facile, car il leur fallait simplement suivre le cours de la rivière pour pénétrer dans la région suivante, sans manquer d'eau.

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Message par Laegwing Mer 9 Nov - 21:57

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Marais


La suite du voyage s'avéra bien plus agréable. Les deux compagnons longeaient le plus possible la rivière, et y descendaient lorsque le relief le permettait afin de s'abreuver et se rafraîchir. En début de soirée, la végétation recommença à verdir et quelques tapis d'herbe fraîche firent leur apparition, pour leur plus grand bonheur.

Le vent se levait rapidement, ondulant entre les collines comme un insaisissable serpent. Si, au début, il était plaisant, il devint vite agaçant et contraignant un peu plus tard. En effet, il commença à souffler fort, et face aux voyageurs, rendant leur progression difficile dans le relief abrupt. Les collines se firent également de plus en plus escarpées et rocheuses, et très irrégulières, trompant l'œil et le pas. Laegwing se fit avoir, et se retrouva à l'aube face à un précipice, après avoir passé un long moment à descendre les pentes glissantes avec prudence. Elle fut contrainte de faire demi-tour et de tout remonter.

Elle finit par retrouver son chemin et atteindre à nouveau la gorge, qui la mena directement aux Marais de l'Eau-aux-Cousins. C'était pour elle une nouvelle région fort désagréable, mais elle l'était encore plus pour Faradêl, qui se faisait harceler par les moustiques qui pullulaient dans ces eaux stagnantes et non potables. Si le vent était tombé, l'air était lourd et chargé d'humidité, ce qui n'arrangeait pas les choses.

Le terrain était boueux, glissant et traître. Fort heureusement, Laegwing était une Elfe et son pas était léger, ce qui lui évitait de s'embourber dans la vase. Le loup avait toutefois un peu plus de mal, et après plusieurs heures de progression dans les marais, était déjà sale de l'encolure aux pattes, teignant son poil presque blanc d'un brun verdâtre. La fatigue le gagnait, mais Laegwing se refusait à faire une pause ici et préférait attendre de quitter les marais.

À la tombée de la nuit, elle croisa un éclaireur gobelin qui marchait à travers les marais d'un pas incertain. D'entre toutes les sombres créatures engendrées par les ténèbres, c'étaient les gobelins que Laegwing haïssait le plus. Elle ne prit pas la peine de le tuer à l'arc, et alla plutôt le chercher au corps à corps, le décapitant d'un coup d'épée rageur. Elle prit sur elle pour ne pas pourchasser les autres qui étaient forcément non loin, et préféra laisser cette tâche aux Rôdeurs dunedain et poursuivre sa traversée, afin de ne pas s'attarder dans cet horrible endroit.

Au matin, elle et Faradêl quittèrent enfin les marais. Elle se dirigea au Nord-Ouest et atteignit au zénith de la Soleil un vaste point d'eau situé entre Combe et Staddel. Le loup s'y plongea avec bonheur, se débarrassant finalement de cette boue qui le démangeait. Laegwing en profita également pour nettoyer ses vêtements.

Ils reprirent la route quelques heures plus tard, et atteignirent au soir les abords de Bree. Laegwing hésita. Elle voulait rester seule, et croiser aussi peu de monde que possible ; toutefois, elle n'était pas contre un repas chaud et du vin, et ses provisions avaient besoin d'être reconstituées. À contrecœur, elle pénétra la ville par la porte de Combe.

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Message par Laegwing Dim 13 Nov - 14:39

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Liltharhethil


Les rues de Bree étaient agitées, animées et surtout bruyantes comme à leur habitude. Les marchands criaient pour attirer l'attention une dernière fois avant que la nuit ne tombe, tandis que colporteurs et crieurs de rue annonçaient les dernières nouvelles. Parfois, des enfants passaient en courant et en bousculant les passants. On pouvait aussi croiser quelques individus étranges, masqués, encapuchonnés, dont personne ne s'approchait.

Laegwing n'avait jamais spécialement apprécié cette ville, ses habitants et son agitation. Mais la situation de carrefour du bourg en faisait une destination de choix, tant pour se reposer durant un voyage que pour écouter les dernières rumeurs. Et le meilleur lieu pour tout cela était la fameuse auberge au Nord de la ville.

Si l'Elfe n'aimait pas l'agitation des rues (tout comme Faradêl, d'ailleurs), elle en restait globalement préservée, étant naturellement placée au même rang que les « individus louches ». En temps normal, la plupart des passants restaient soigneusement à l'écart de cette Elfe qui dépassait de taille la plupart de leurs hommes, imposante et fortement armée ; mais maintenant qu'elle était accompagnée d'un grand loup, c'était un véritable vide qui se créait autour d'elle à son passage. Et le moins qu'on puisse dire, c'est qu'elle entretenait soigneusement ce vide, avec sa démarche si droite et assurée qui la grandissait encore plus, ses bras dédaigneusement croisés et l'indifférence la plus soignée qui émanait d'elle.

Faradêl avait cependant beaucoup plus de mal à rester calme. Étant depuis son plus jeune âge toujours resté auprès de Laegwing et des Elfes, l'insupportable fourmillement d'une grande bourgade humaine l'angoissait beaucoup. Il avait les oreilles couchées et le poil hérissé et n'hésitait pas à grogner si un humain approchait un peu trop. Laegwing posait de temps en temps sa main sur sa tête ou son échine pour l'apaiser.

Après quelques minutes de marche, les compagnons atteignirent finalement la grande place sur laquelle se trouvait l'auberge. Laegwing tira sur sa capuche pour masquer un peu plus son visage, ce qui était parfaitement inutile, car ceux qui la connaissaient la reconnaîtraient au premier coup d'œil. Elle espérait toutefois ne pas croiser de visages familiers, afin d'avoir la paix.

L'intérieur n'était pas moins agité que l'extérieur, mais c'était toujours le même vide qui se créait autour de l'Elfe. Elle prit de quoi manger avec la voix la plus neutre possible, qui marquait fortement le désintérêt total qu'elle portait aux clients de la taverne. Ceux qui la fixaient un peu trop croisèrent l'éclat vert tranchant de ses yeux et détournaient bien vite le regard.

Elle se fraya sans problème un chemin jusqu'à une table vide à laquelle elle s'installa, et entama son repas chaud qui lui fit le plus grand bien. Faradêl avait, quant à lui, un gigot à peine entamé, qui l'occupa un bon moment.

Comme à son habitude lorsqu'elle se retrouvait dans cet endroit, elle laissa ses vives oreilles capter toutes les conversations qui passaient à leur portée. Sa concentration exercée faisait le reste, ne s'attardant que sur celles qui étaient intéressantes. Elle espérait entendre des nouvelles du Nord qui lui seraient utile d'apprendre pour son voyage, mais elle n'entendit rien de passionnant.

Elle attendit que le loup termine son repas pour se diriger à nouveau vers le comptoir. Elle prit de quoi renouveler ses provisions, puis paya et quitta la taverne. Le voyage avait été long et laborieux, et elle désirait (autant que son compagnon) un peu de repos au calme avant de reprendre la route. Elle avait son endroit fétiche pour cela dans le pays.

Elle traversa toute la ville jusqu'à atteindre la porte méridionale. Elle continua de marcher pendant une demie-heure vers le Sud, jusqu'à atteindre un véritable sanctuaire de paix : une clairière cerclée de rochers et de gigantesques arbres séculaires. Elle se sentait bien dans cet endroit. Sa main se posa instinctivement sur l'écorce d'un des vieux arbres, et l'Elfe put sentir la sève qui palpitait dessous.

Ce lieu dégageait tant de paix, que sa maudite brume se dissipa. Elle put enfin admirer à loisir les Étoiles si chères à son cœur, et la Lune qui, ce soir-là, était pleine. Elle se débarrassa du superflu de son équipement – arc, carquois, cape, spallières, gants et bottes, mais conserva ses épées. Ce soir, elle avait envie de danser.

Laegwing dégaina lentement ses lames, dans un bruit fin et tranchant, presque aérien. La lueur nacrée des astres nocturnes s'y reflétait, les faisant luire d'une douce lumière argentée. Elle les fit doucement tourner, admirant comment leur éclat semblait planer dans l'air à chaque mouvement. Avec grâce et lenteur, elle tournait de temps en temps sur elle-même, en portant quelques coups dans l'air. Puis elle s'immobilisa un moment, en fermant les yeux... et la danse commença.

Elle tourbillonna soudainement avec une rapidité et une agilité saisissantes, ses lames la suivant dans ses mouvements, tranchant l'air dans un son céleste. Sa chevelure sauvage virevoltait dans tous les sens. Quelques pas en avant, quelques pas en arrière, quelques croisements, et son corps tournait, tournait, avec une divine souplesse, et ses lames valsaient et tranchaient, laissant une traînée de leur brillance à chaque mouvement. Laegwing maîtrisait ses armes à la perfection, comme si elles n'étaient qu'une extension de ses bras. C'était une danse magnifique et saisissante, mais dangereuse ; elle ne différait pas vraiment dans un combat réel. Ce soir-là, avec seules la Lune et les Étoiles pour témoins, Laegwing mérita une fois de plus son surnom de Liltharhethil : Dansent-Lames. Elle avait le don de rendre la guerre artistique, ses coups d'épée beaux et sauvages, et l'acte de tuer presque gracieux, dans un mélange aussi étonnant que dérangeant.

Elle valsa une quinzaine de minutes avec ses deux plus fidèles amies, puis acheva sa danse en rengainant ses armes. Elle n'était pas essoufflée, son corps s'étant largement habitué durant plusieurs millénaires d'expérience. Puis elle s'assit dans le creux d'un arbre, et se laissa aller au repos et à la contemplation de l'œuvre d'Elbereth qu'elle n'avait pas eu souvent l'occasion de voir ces derniers temps.

La nuit passa ainsi, les vieux arbres alliés aux Étoiles veillant sur l'Elfe sylvestre et lui assurant la paix de l'esprit.

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Message par Laegwing Lun 14 Nov - 16:23

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Vieille Forêt



À l'aube naissante, Laegwing eut grand mal à quitter son havre de paix. Mais elle savait qu'elle ne pouvait rester éternellement ici, aussi rassembla-t-elle ses affaires. Elle secoua Faradêl, qui, pris d'un accès de fainéantise, ne semblait pas avoir grande envie de se lever. Il s'étira exagérément plusieurs fois avant de daigner se redresser. La marmotte enfin réveillée, les compagnons reprirent la route. Laegwing fit juste une courte halte un peu plus loin, au bord du lac de Bonneprise, pour se baigner et se rafraîchir.

Ils longèrent Bree par le Sud – il était hors de question de pénétrer à nouveau la ville. Si ce pays était essentiellement humain, la terre était belle et verdoyante, et sa traversée fut fort agréable (si l'on exceptait les quelques voyageurs croisés). Laegwing n'avait pas envie d'emprunter la route, et donc le pont qui enjambait la rivière. Elle préféra traverser celle-ci à l'aide de bonds longs et gracieux sur les rochers, tandis que Faradêl ne se priva pas pour prendre un nouveau bain.

Les sombres frondaisons de la Vieille Forêt se dressèrent devant eux dans l'après-midi. Les deux compagnons entrèrent dans ces bois sans crainte, contrairement à la plupart des humains et des hobbits de la région. Maintes et maintes histoires effrayantes couraient sur ce lieu, mais Laegwing connaissait bien cette forêt et n'avait pas peur d'elle. Au contraire... elle l'aimait beaucoup.

Ce détour dans la Vieille Forêt ne faisait que les ralentir, mais l'Elfe tenait beaucoup à y passer. Il n'y avait rien qu'elle aimait plus que les bois très anciens. Avec nostalgie et mélancolie, elle se remémora l'époque où, après avoir quitté sa terre natale pour gagner l'Eriador, elle s'était arrêtée en chemin dans la forêt de Fangorn. Enchantée de ce qu'elle y avait trouvé, elle y avait demeuré plusieurs années, seule – en exceptant quelques longues, longues discussions avec des Onodrim. En regagnant finalement l'Eriador, visiter la Vieille Forêt fut une de ses premières priorités.

Elle avait rapidement noté les différences avec Fangorn. Il n'y avait plus d'Onodrim dans la Vieille Forêt, et les Huorn pleins de colère avaient fini par rendre ces bois très dangereux, sombres et étouffants, avec seul Iarwain Ben-Adar, le Sans-Père, pour les maîtriser. Nulle route n'était sûre en ce lieu. Partout, la végétation dense gênait le pas, les bosquets se resserraient pour empêcher le passage, et les racines s'élevaient traîtreusement pour faire chuter les jambes non vigilantes. Les Huorn les plus cruels prenaient même au piège les voyageurs indésirables, qu'on ne revoyait jamais.

Mais Laegwing venait de la Forêt Noire. Aucune forêt n'était plus dangereuse que celle-ci. Il n'y avait aucun arbre que l'Elfe sylvestre pouvait craindre, car les bois étaient son domaine, et elle se sentait chez elle dans n'importe quel bosquet. Elle avait rapidement fini par maîtriser les Huorn de la Vieille Forêt, et eux l'avaient assez vite tolérée sur leur territoire. Ils ne lui refusaient aucun passage.

La traversée des bois fut donc aisée et agréable. La nature profonde de Laegwing resurgissait, et elle bondissait entre les arbres et les racines, agile comme un écureuil, Faradêl aux talons. Celui-ci ne craignait pas plus cet endroit qu'elle, car il y était né. C'était au cœur de ces bois que Laegwing avait, plusieurs mois auparavant, découvert un spectacle macabre : une petite meute de loups décimée, leur fourrure arrachée. Un couinement avait alors attiré son attention, et c'était au plus profond d'une tanière qu'elle avait trouvé une toute petite boule de poils gris qui tremblait comme une feuille. Le cœur déchiré par le destin du louveteau qui ne devait pas avoir plus de deux semaines, elle l'avait pris avec elle et ramené dans la demeure des siens à Falathlorn. Le petit loup, qui passait son temps la nuit à regarder le ciel, reçut le nom de Faradêl (qui, en langue commune, signifie « Chasse-Étoile ») et adopta rapidement Laegwing comme nouvelle maman.

Le cœur de l'Elfe se serra à la pensée que la vie du loup n'était qu'un clin d'œil dans la sienne, et que, bientôt à ses yeux, elle devrait se faire à sa disparition. Mais elle ne regrettait pas de l'avoir recueilli.

La nuit ne tarda pas à tomber, enveloppant la forêt d'impénétrables ténèbres – et enchantant de plus belle les deux compagnons. Faradêl ne put résister à un hurlement à la lune digne de ce nom, qui reçut plusieurs échos, ce qui fit sourire Laegwing. Au milieu de la nuit, les compagnons se reposèrent – non pas que l'Elfe en avait besoin, mais Faradêl traînait la patte. La sylvaine se hissa agilement sur une branche, tandis que son compagnon se roula en boule contre une racine.

De nouvelles heures de quiétude passèrent, et encore une fois, Laegwing n'eut pas envie de quitter ce lieu.

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Message par Laegwing Jeu 17 Nov - 18:42

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Le début de la fin


Le matin s'installait, mais les rayons de la Soleil peinaient à traverser les épaisses frondaisons des arbres. Laegwing serait bien restée au sein de cette forêt, à consommer sa peine, à l'image du temps où elle avait demeuré entre les racines de Fangorn. Nouvelle perte, nouvel exil. Mais aujourd'hui, de nouveaux liens et de nouvelles obligations empêchaient sa douleur solitaire de la retirer loin de tout, et elle prit sur elle pour continuer sa route. Voyager était une manière pour elle de détourner ses sombres pensées de leur objet, en les concentrant uniquement sur les pas qu'elle devait faire, le chemin qu'elle devait emprunter, les sens qu'elle devait solliciter. Cela réclamait une force mentale considérable, mais qu'elle possédait. Laegwing était comme le vieux chêne entre les racines duquel elle avait vu le jour : elle résistait avec obstination aux tempêtes les plus violentes.

Dans l'après-midi, les deux compagnons atteignirent une source magnifique. Une belle cascade dévalait les roches, projetant ses embruns rafraîchissants autour d'elle. On pouvait apercevoir quelques lys d'eau flotter par endroits, ajoutant au charme de ce lieu enchanteur. L'Elfe savait l'eau de cette source très pure, aussi elle et Faradêl prirent-ils le temps de s'y désaltérer et s'y baigner.

En revêtant son armure après s'être rafraîchie, Laegwing perçut de ses vives oreilles un son infime, comme des pieds doux et légers qui marchaient sur les feuilles, et la caresse d'un tissu fin sur le sol. Il lui suffit de jeter un coup d'œil au loup pour avoir la certitude de l'origine des pas : il ne grognait pas, il paraissait simplement intrigué.

Une grande et belle silhouette quitta alors le couvert des arbres pour se diriger avec douceur vers la source. Il s'agissait de Baie d'Or, la compagne de Iarwain Ben-Adar, dont on disait qu'elle égalait en beauté les Elfes, et même plus encore. Les deux femmes se regardèrent, l'une avec un doux sourire, l'autre un signe de tête respectueux. N'importe quel voyageur égaré aurait contemplé cette scène avec un émerveillement teinté de surprise, à la vue de ces deux femmes si différentes. Les douces ondulations dorées et délicates s'opposaient à la sauvage cascade brune et cuivrée. Le bleu pâle de myosotis se plongeait dans le vert de jade tranchant. Une robe d'un vert de roseau, perlée d'argent et ceinte d'or d'un côté, une armure de cuir renforcé d'un vert sapin ornée de feuilles brunes de l'autre.

Baie d'Or, après avoir un instant plongé son regard dans celui de Laegwing, lui adressa un simple sourire doux avant de se diriger d'un pas gracieux et dansant vers la source, un panier d'osier finement tressé à la main. Ses pieds nus et délicats rencontrèrent l'eau. Elle ramassa quelques lys d'eau qu'elle posa dans son panier.

Laegwing acheva de revêtir son armure et de récupérer ses armes avec le plus de discrétion possible. Elle avait beaucoup d'estime pour l'étrange Baie d'Or dont elle ignorait jusqu'à la nature. À ses yeux, elle était simplement la Fille de la Rivière, un esprit des bois et des sources. Elle savait très bien que la femme de Tom Bombadil n'avait pas voulu l'importuner ni briser la solitude dont l'Elfe avait besoin, et celle-ci quitta rapidement ce havre de paix et de pureté qu'elle craignait de déranger avec ses pensées troubles.

À partir de la source de Baie d'Or, le chemin était plus aisé et l'orée de la forêt n'était plus très loin. Laegwing put quitter les bois en fin d'après-midi, en contournant par le nord-est le pays de Bouc qu'elle ne voulait surtout pas pénétrer.

Traverser le pont qui enjambait le Baranduin la répugnait également. Elle n'avait vraiment pas envie de parler avec les hobbits, ni les effrayer : ceux-ci avaient une grande crainte des loups, et la vue de Faradêl ne risquait pas de les rassurer sur la voyageuse. Elle se mit alors en quête d'un endroit où elle pouvait traverser le fleuve, et elle marcha une bonne trentaine de kilomètres le long du cours jusqu'à atteindre le Gué de Sarn, seul moyen alternatif au Pont des Arbalètes pour atteindre l'autre rive.

Une fois en Comté, elle profita de la nuit tombante pour se cacher au mieux des yeux des Semi-Hommes. Par chance, c'était l'heure du dîner chez les Hobbits, et elle put voyager tranquillement vers le Nord sans se faire remarquer. Elle n'était jamais vraiment à l'aise avec ce peuple dont l'insouciance la gênait. Ils étaient certes charmants, mais le caractère de Laegwing faisait qu'elle pouvait facilement être agacée du comportement des Petites Gens.

La Comté était agréable à traverser. Le terrain était facile à pratiquer, et les arbres n'étaient pas rares. Laegwing voyagea donc très rapidement, ne faisant que de brèves haltes pour Faradêl au bord des nombreux points d'eau qui parsemaient la région. La nuit se déroula tranquillement. Au midi du lendemain, les compagnons pénétrèrent l'Evendim en longeant le Baranduin, contournant ainsi les fermes hobbites de Castelorge.

Laegwing profita d'une hauteur pour contempler ces belles terres. Les froides montagnes du Nord se dressaient, glaciales et majestueuses, presque menaçantes pour l'Elfe qui voyait son voyage lorgner son terme de loin, ignorant ce qui se trouverait au bout. Elle ne pouvait détacher ses yeux du Nord, et l'angoisse la reprit de plus belle, venimeuse.

Elle atteignit le Barandalf et les plages du Baranduin dans la soirée. Elle et Faradêl firent halte sur une butte verdoyante dominant le sable épais et l'eau brune du fleuve. Si le loup s'endormit comme une masse, le repos méditatif de Laegwing fut troublé, agité par ses craintes qui avaient repris le dessus. Elle luttait avec acharnement contre son propre esprit qui lui imposait les visages de Gilgaladrim et Fingoldel qui semblaient désirer s'imprégner sur la rétine de ses yeux. Torturée par ce repos qui l'épuisait plus qu'une course effrénée, elle se redressa et prit ses lames, et dansa encore une fois, comme pour trancher de ses épées cette brume qui l'oppressait.

Quelle vérité s'imposerait au Nord ?

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Message par Laegwing Mer 23 Nov - 0:12

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Blessure


Un matin brumeux et humide se leva, parant la plage et les collines d'un gris terne et froid. Le temps s'était visiblement accordé à l'humeur de Laegwing, mais celle-ci n'y prêta pas grande importance. Au moins, cette brume-là était réelle.

L'Elfe longea la plage par les collines, évitant le sable dans un réflexe (peut-être un peu inutile) de ne pas laisser trop d'empreintes. Si son pas léger ne marquait qu'à peine le sol, les pattes de Faradêl laissaient des traces bien plus visibles. La quiétude ennuyeuse du voyage fut toutefois troublée par un groupe de brigands qui campaient sur une butte. Si Laegwing les avait repérés depuis quelques temps déjà et poursuivait sa route dans l'indifférence la plus totale, les bandits ne la virent que lorsqu'elle passa à quelques mètres de leur camp. Et ils ne semblèrent pas vouloir faire preuve de la même indifférence que l'Elfe.

Quatre brigands descendirent leur butte à toute allure pour encercler Laegwing, dont le visage n'avait pas laissé filtrer la moindre émotion. À côté d'elle, Faradêl grogna.


- Alors, ma grande, fit un des bandits qui la regardait d'en bas, t'sais qu'c't'endroit l'est à nous ? Va falloir payer.


Laegwing lui adressa un regard tranchant comme l'acier de ses lames, qui à lui seul fit faire un pas en arrière au brigand.


- J'vais prendre ça pour un refus, la perche ! (il fit un signe de tête à ses acolytes qui dégainèrent leurs cimeterres en même temps que lui.) Va falloir qu'on fasse le boulot nous-mêmes !


Une brusque tentative d'attaque d'un des pilleurs fut mise en échec par Faradêl, qui montra à sa gorge à quel point sa mâchoire était puissante. Les trois autres prirent cela comme signal pour attaquer à leur tour. D'un geste rapide, Laegwing dégaina ses épées. Dans un premier mouvement, elle empêcha l'un des malandrins de s'en prendre au loup, pendant que son autre lame tranchait la gorge d'un autre. Et dans un deuxième, elle s'occupa des deux encore debout, avant de rengainer avec un petit soupir, son visage ne s'étant pas départi du – bref – combat de son masque d'acier.


- Il fut un temps où les miens vainquaient des adversaires dont la mort offrait bien plus de gloire que ceux-là, pensa-t-elle à voix haute en fixant les cadavres.


Elle fit une grimace avant de rajouter avec un mépris suintant :

- Vermines...


Mais elle réalisa soudain que sa mémoire sensorielle se souvenait d'un groupe de cinq brigands, et non quatre. Elle fronça les sourcils en commençant à se retourner vers la butte, mais ce fut une erreur : un carreau d'arbalète vint se loger au creux de son épaule droite, sous sa spallière. Elle poussa un gémissement à peine perceptible tant elle l'avait étouffé. Le bandit arbalétrier se mit plus à découvert en plaçant un nouveau carreau dans son arme, enthousiasmé par la réussite de son coup. Ne se préoccupant pas outre mesure de sa blessure, et tâchant de laisser son visage parfaitement impassible, Laegwing prit son arc, et montra à l'idiot qui aurait pu vivre plus longtemps ce que signifiait « viser vite et bien ».


D'un geste sec, elle arracha le carreau de son épaule. Heureusement pour elle que ces chiens galeux visaient comme des ivrognes ! La blessure n'était pas grave, simplement gênante et un peu douloureuse. Toutefois, la pluie commençait à tomber, et elle préféra ignorer la plaie le temps de trouver un endroit approprié pour la bander. Elle reprit la route, l'air de rien, bien que son armure se tachât déjà de sang, écrasant le vert sous un rouge sombre. D'aussi loin que sa mémoire d'elfe se souvenait, elle avait toujours eu cette incroyable fierté, qui y était pour beaucoup dans sa vocation de guerrière. Elle se refusait à montrer qu'elle avait mal et prenait constamment ce visage dur et impassible qui était le sien, et cela avait tendance à fortement empirer avec le temps.

La pluie tomba dru toute la journée, et les deux compagnons étaient trempés. Laegwing aimait beaucoup la pluie, qui l'apaisait énormément, mais l'eau s'infiltrait un peu dans sa plaie et cela la gênait. Elle marcha jusqu'à l'aube, s'arrêtant devant le pont immense orné d'une statue gigantesque qui franchissait le Baranduin. On appelait cet endroit le « carrefour du haut-roi ». Elle savait qu'un groupe de Rôdeurs se trouvait sur ce pont. Elle avait de l'estime et de l'amitié pour eux, mais la perspective de déranger sa solitude la faisait grimacer. Toutefois, ce camp offrirait une bonne occasion de soigner sa plaie et se reposer – et de toute façon elle ne pouvait pas traverser le fleuve d'une autre manière.

Les Rôdeurs présents ne manquèrent pas de la saluer avec respect, comme ils le font avec les Elfes. Ils parurent quelque peu surpris par le loup, mais ne firent aucun commentaire.


- Vous êtes blessée, Dame ? S'enquit un homme qui avait remarqué la tâche sombre sur l'épaule de Laegwing. Attendez... (avant que Laegwing ne put dire quoi que ce soit, il s'adressa à un de ses compagnons.) Va chercher Dame Celebrindhren, elle fera ça mieux que nous.


Laegwing demeura silencieuse, intriguée par le nom mentionné par le Rôdeur. Elle ôta sa cape trempée, libérant sa chevelure humide. Le Rôdeur revint avec une Elfe qu'elle avait déjà vaguement aperçu à Imladris.

Elle était plus petite qu'elle, et bien plus fine, mais avec un teint tout aussi pâle. Une longue chevelure soyeuse couleur d'argent glissait dans son dos, et ses yeux d'une teinte similaire luisaient comme des étoiles, illuminant son beau visage d'une lueur douce et étrange. Laegwing reconnût là une Elfe d'Aman, car son regard portait toujours la lumière des Deux Arbres (et plus particulièrement celle de Telperion). C'était sans doute une Teler, à en juger par son apparence. Elle ne put s'empêcher de noter quelques ressemblances avec son compagnon avec un pincement au cœur bien plus douloureux que la plaie à son épaule.

La gwanwen fit un pas vers elle avec un sourire et un salut de tête respectueux.

- Je suis Ilsaiel, fit-elle d'une voix douce en Sindarin, mais les hommes d'ici me nomment Celebrindhren.

______


[HRP*] On peut traduire "Celebrindhren" par "sage couronnée d'argent". "Gwanwen" est un mot qui désigne un Elfe venant d'Aman.


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Message par Laegwing Jeu 24 Nov - 19:09

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Vert et argent


Ilsaiel avait attiré Laegwing sous une tente, à l'abri des regards. Là, elle lui demanda d'ôter son armure afin qu'elle puisse s'occuper de la plaie. Elle ne put visiblement empêcher un haussement de sourcil étonné ou impressionné (ou peut-être les deux), en voyant le corps de Laegwing. Son regard s'attarda sur les quelques cicatrices à peine visibles, qui zébraient son buste ou ses bras par endroits. Elles semblaient être sur le point de s'estomper totalement et ne devaient donc pas être bien vieilles. Elle prit doucement le bras droit de la sylvaine.


- Vous avez une musculature impressionnante pour une elleth, fit Ilsaiel en observant avec expertise les muscles du bras de sa patiente. (Son index fin courra sur une cicatrice au-dessus du coude.) Une guerrière, n'est-ce pas ? Rares sont les ellith à emprunter cette voie.


Laegwing demeura silencieuse, se laissant examiner sans protester. Ilsaiel ne s'offusqua pas de l'absence de réponse. Après tout, il n'y avait pas grand chose à rétorquer. Elle entreprit de nettoyer consciencieusement la plaie, avant d'ouvrir une large sacoche à son flanc, dont le contenu était impressionnant : maintes herbes et plantes, un grand nombre de flacons et autres onguents, du linge, du nécessaire à couture... Elle se saisit d'un pot empli d'une pâte beige qu'elle étala soigneusement sur la blessure en tâchant de la faire pénétrer le plus possible.


- La blessure n'est que superficielle, fit l'Elfe aux cheveux argentés. Votre armure a bien rempli son rôle.


Laegwing se contenta de hocher légèrement la tête. Ilsaiel entreprit de lui faire un bandage correct, ce qui fit grimacer la sylvaine.


- Le bandage est-il nécessaire ? Demanda-t-elle à la guérisseuse.
- Préférable, pour que l'onguent fasse son effet et que la plaie se referme plus vite. Le frottement du cuir de votre armure ou le contact de l'air risqueraient de ralentir la guérison.


Laegwing ne répondit plus rien, laissant Celebrindhren faire son travail. Celle-ci termina rapidement et rangea ses affaires, tandis que la guerrière se rhabillait.


- Pourquoi avoir pris les armes ? Demanda alors Ilsaiel.


Laegwing arqua un sourcil à la question. Elle fit silence un moment avant de répondre.


- Je suppose que j'ai cela dans le sang. (Ilsaiel fronça un instant les sourcils.)
- Nous avons tous reçu un héritage, fit-elle d'une voix douce. Mais nous ne choisissons pas nécessairement de l'utiliser. Alors pourquoi avoir emprunté cette voie ?


Laegwing prit le temps de sangler correctement ses spallières, puis répondit de sa voix grave et neutre :


- Il a toujours été naturel pour moi de protéger ce qui m'est cher, et anéantir ce qui me nuit.


Ilsaiel l'observa un moment de ses yeux étoilés, avec un air intéressé. Faradêl, allongé non loin de son amie, paraissait presque suivre la conversation.


- Vous me rappelez mes amis Noldor, fit alors la Teler. J'en ai connu un certain nombre partageant votre vision. (Elle sourit avec une légère pointe de malice.) Ce ne doit pas être un hasard.


Laegwing porta son regard sur la gwanwen avec un air légèrement étonné.


- Devrais-je me méfier de votre sens de l'observation ? Demanda-t-elle, cette fois-ci avec un léger sourire. Ou peut-être de votre expérience. Je pense que vous avez déjà votre réponse. En effet, ce n'est pas entièrement un hasard.


Ilsaiel esquissa un sourire amusé.


- Quelle est donc votre ascendance ? Demanda-t-elle avec une curiosité polie.
- Mon grand-père maternel et ses parents constituent mon seul sang noldorin.
- Je suppose que vous avez fortement hérité de ce sang.
- C'est une chose que l'on m'a souvent répétée.


Le silence s'installa pendant quelques instants, durant lesquels chacune observait l'autre.


- Vous êtes une des Teleri d'Aman, n'est-ce pas ? Finit par demander Laegwing, son visage se fermant à nouveau – ce que ne manqua pas de noter Ilsaiel.
- En effet, répondit l'autre, plissant les yeux comme pour mieux cerner les pensées de la sylvaine. Je viens d'Alqualondë, le grand Port des Cygnes.


Laegwing s'assit près du loup, passant sa main dans son pelage d'hiver presque blanc.


- Connaissiez-vous bien les Teleri qui y vivaient ?
- Eh bien, pas tous, bien entendu, répondit Ilsaiel d'un air perplexe. Mais une bonne partie.


La guerrière regarda un bon moment le vide, immobile comme une statue, avant de reprendre.


- Y avez-vous déjà rencontré un certain Fingoldel ?


Ilsaiel fronça les sourcils et réfléchit un moment.


- Fingoldel, dites-vous ? Ce nom m'évoque bien quelque chose. (Elle réfléchit encore un instant.) Si ma mémoire ne me fait pas défaut, c'était un enfant d'Alqualondë. Je ne l'ai jamais revu après... (Elle fit une grimace.) Après le massacre des nôtres. J'ai songé qu'il y avait péri. Pourquoi cette question ?


Laegwing secoua légèrement la tête comme pour se réveiller.


- Oubliez. Cette question n'avait aucun intérêt.


Le regard astral d'Ilsaiel se posa soudain sur la bague qui ornait la main de la sylvaine. Un éclair de perspicacité traversa ses yeux, mais malgré qu'elle semblât avoir compris qui était ce Fingoldel pour Laegwing, et peut-être bien d'autres choses encore, elle ne fit aucun commentaire.


- Et vous, pourquoi avez-vous emprunté la voie de la guérison ? Demanda la guerrière pour changer de sujet.
- Je suppose que j'ai cela dans le sang, fit Ilsaiel avec un sourire malicieux, avant de continuer d'un air plus sérieux. Si le devoir que vous vous êtes attribué est de protéger, le mien est de soigner. Je referme les blessures du corps et de l'esprit que les ombres ouvrent. En particulier celles des combattants comme vous qui s'efforcent jusqu'à l'épuisement de préserver le monde qui est le nôtre. Cette tâche m'a toujours parue naturelle. À votre instar.


Les deux ellith se regardèrent avec une lueur de compréhension dans les yeux. Elles étaient totalement différentes, et les voies qu'elles avaient emprunté totalement opposées. Pourtant, elles se rejoignaient, pour aller dans une seule et même direction.

Ilsaiel et Laegwing étaient aussi différentes et bien accordées que le vert et l'argent.

______

[HRP*] elleth (pluriel ellith) est le mot qui signifie femme elfe.


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Message par Laegwing Dim 27 Nov - 18:33

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Vers Tinnudir


- Pourquoi êtes-vous ici, Ilsaiel ? Questionna Laegwing après un instant de silence.
- Les Dúnedain ont besoin d'aide, répondit la gwanwen. Ils mènent beaucoup de fronts par ici, et nombre d'entre eux reviennent blessés.


Laegwing hocha simplement la tête.


- Mais vous, commença Ilsaiel après l'avoir observée quelques secondes, vous n'êtes pas ici pour aider les Rôdeurs. Qu'est-ce qui vous mène dans les environs ?


La sylvaine prit son temps pour répondre.


- Je ne m'attarde pas en Evendim. Certaines choses m'attendent au Nord.


Ilsaiel haussa un sourcil, mais ne paraissait que modérément étonnée.


- La baie gelée du Nord ? Eh bien, ce ne sont point mes affaires, mais je reste intriguée.


Laegwing demeura silencieuse, indiquant qu'elle ne dirait rien de plus. Son interlocutrice n'insista pas outre-mesure, mais son regard luisait d'une perspicacité dérangeante. Elle semblait lire dans le cœur des gens comme dans un livre ouvert, et la guerrière préféra détourner ses yeux.


- Vous devriez vous rendre à Tinnudir, reprit la Teler. Vous pourrez vous reposer et prendre des repas chauds là-bas, vous et votre compagnon. (Elle posa son regard sur le loup avec un petit sourire, tandis que Laegwing semblait hésiter.) Passez-y au moins deux ou trois jours, le temps que votre blessure guérisse un peu.


L'idée semblait déplaire à la guerrière. Elle n'avait pas pour projet de s'attarder, surtout en compagnie, et les montagnes du Nord la narguaient un peu plus chaque minute. Elle poussa un petit soupir.


- Je n'y passerai qu'une seule nuit, et repartirai au crépuscule suivant.


Ilsaiel esquissa un petit sourire et hocha la tête, puis quitta la tente, laissant la sylvaine seule avec Faradêl. Laegwing reprit sa caractéristique immobilité de statue quelques instants, songeuse. Le loup la sortit de ses pensées par un gémissement impatient. Elle finit par se redresser et récupérer son armement, avant de sortir à son tour de la tente.

La matinée commençait à s'installer, doucement. La pluie s'était arrêtée de tomber, et le temps était moins brumeux, bien que toujours gris. Ilsaiel discutait avec un Rôdeur. Elle se retourna vers elle, avec un de ses sourires doux.


- Je vais venir avec vous à Tinnudir, fit-elle. J'aurai plus à faire là-bas.


Laegwing acquiesça d'un signe de tête. La gwanwen noua une cape autour de ses épaules et en rabattit la capuche, dissimulant sa chevelure et son visage. La sylvaine fit de même.

Elles quittèrent seules le campement. Les Rôdeurs ne paraissaient pas inquiets pour l'Elfe guérisseuse, semblant avoir compris qu'elle était entre de bonnes mains avec Laegwing. Les trois compagnons quittèrent le grand pont et entamèrent l'ascension plutôt raide des collines, suivant la route qui sinuait entre elles.

Laegwing préféra prendre son arc en main, y encochant une flèche. Elle sentait de l'activité sur ces collines et n'aimait pas trop cela. Elle était attentive au moindre bruit qu'elle percevait et scrutait consciencieusement les environs. Les deux Elfes et le loup arrivèrent devant des ruines humaines, et Faradêl se mit à grogner. Ilsaiel fit signe à Laegwing de la suivre, et elles se tapirent dans des buissons dans lesquels elles pouvaient voir ce qu'il se passait dans les ruines. De temps à autres, on apercevait un homme ou une femme en guenilles et armé(e) qui passait.


- Des pilleurs de tombes et de ruines, dit Ilsaiel. Ils se sont répandus en Evendim, et se multiplient comme des larves. Les Dúnedain ont beaucoup à faire avec eux. Ils doivent préserver leur héritage des mains cupides de ces brutes.


Laegwing hocha la tête, concentrée sur l'activité des brigands.


- Partout où une ruine se dresse, un groupe de pilleurs se trouve, continua-t-elle. Et ils patrouillent dans les collines pour être certains qu'on ne les dérange pas dans leurs sombres affaires. (Elle tourna son beau visage vers Laegwing.) Il faut que nous prenions garde. La route jusqu'à Tinnudir est loin d'être sûre.


Elle quittèrent les buissons pour reprendre leur chemin avec une vigilance accrue. L'ouïe de Laegwing fonctionnait à plein régime, et les sens de Faradêl aidaient beaucoup aussi. Ilsaiel, quant à elle, semblait avoir une vue très perçante.

Alors que la Soleil commençait à atteindre son zénith, le groupe perçut un mouvement autour d'eux, et Faradêl gronda. Un groupe de brigands les encercla avec un sourire mauvais sur leur visage laid, épées, cimeterres et dagues à la main. Ils riaient grassement, lançant des piques ridicules aux voyageurs, raillant et provocant ouvertement. Mais cela glissait sur les deux Elfes comme l'eau sur les plumes. Laegwing se contenta pousser un léger soupir ennuyé, et, avec lenteur et indifférence, rangea son arc et dégaina doucement ses lames dans un long crissement strident de métal, ce qui fit un peu estomper les sourires des bandits. Ilsaiel ne semblait pas armée, et demeurait droite et immobile, les bras croisés. Toutefois, Laegwing avait senti une espèce de présence fantôme pendant tout leur voyage, et ne pouvait se sortir de la tête qu'elle était liée à la gwanwen.

Les brigands, lassés, se jetèrent sur les trois compagnons. Laegwing et Faradêl se défendirent comme à leur habitude, impitoyables. Mais un cri strident retentit des cieux lorsqu'un bandit se jeta sur Ilsaiel, qui était toujours immobile. Un aigle majestueux au plumage blanc comme les neiges les plus pures fondit sur le pilleur et s'occupa de lui avec ses serres, avant de reprendre son envol, décrivant des cercles dans le ciel. Ilsaiel n'avait toujours pas bougé.

La dizaine de bandits gisait à terre dans son propre sang. Avec son expression stoïque coutumière, Laegwing essuya ses armes sur la végétation et rengaina. Celebrindhren finalement esquissa un mouvement, et observa le carnage avec une grimace.


- J'aurais aimé ne pas en arriver là, mais leur violence s'est retournée contre eux, dit-elle.


Laegwing l'observa avec un air intrigué.


- C'était donc cet aigle que je sentais depuis le début. J'ai pensé que vous n'étiez pas armée, mais je me fourvoyais ; vous aviez une arme redoutable.
- Je vous présente, un peu tardivement, Igwiš, répondit Ilsaiel avec un léger sourire. Il est mon plus fidèle ami.


Laegwing fronça légèrement les sourcils en entendant le nom de l'oiseau de proie. Elle ne connaissait absolument pas cette langue, et elle sonnait étrangement à ses oreilles, dans un mélange de puissance, d'implacabilité et d'un mystère ancien.

Le groupe reprit sa route, non sans une dernière grimace d'Ilsaiel à la vue des corps la parsemant. Le reste du voyage s'avéra bien plus tranquille, et nuls autres bandits ne vinrent le troubler. Les compagnons parvinrent devant le pont qui menait à l'île de Tinnudir en début d'après-midi. Laegwing contempla le haut édifice vieux et majestueux qui dominait l'île, vestige de la gloire des hommes. Il semblait être un avertissement, une menace aux ennemis des Dúnedain.

Le groupe pénétra sur l'île. Les sentinelles, reconnaissant Ilsaiel, les laissèrent venir, observant Laegwing avec une curiosité mêlée de respect. Celle-ci les salua d'un simple hochement de tête, avant de porter son regard sur le camp des Rôdeurs. Il fourmillait d'activité. Certains s'entraînaient, d'autres mangeaient, ou palabraient devant cartes et plans.

Laegwing poussa un léger soupir. Non pas qu'elle n'aimât pas la compagnie des Dúnedain et d'Ilsaiel, mais elle avait hâte de retrouver la tranquille solitude de son voyage.

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Message par Laegwing Ven 16 Déc - 16:36

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À Tinnudir


Les Rôdeurs accueillirent les Elfes comme de grandes Dames, ce qui déplut fortement à Laegwing, qui n'aimait vraiment pas cela. Ils leur offrirent un repas chaud et veillèrent à ce qu'elles soient bien installées. Même Faradêl eut droit à des égards. La sylvaine se sentit rapidement oppressée. Elle avait toujours été une solitaire, une Elfe à l'esprit sauvage qui préférait s'éclipser dans les bois plutôt que de participer à une célébration. Par politesse et reconnaissance à l'égard de l'hospitalité des Dúnedain, toutefois, elle ne fit rien.

Les Rôdeurs avaient cependant fort à faire et le calvaire de Laegwing ne dura pas longtemps. Elle en profita pour faire un tour dans le camp, et voir à quoi ses hôtes étaient affairés. Elle entendit plusieurs discussions au sujet d'Annuminas, et d'autres un peu moins vives à propos de divers endroits d'Evendim. Tout en écoutant les échanges animés sur la capitale (le reste l'indifférait totalement, il fallait bien le dire), elle observait quelques Rôdeurs s'entraîner. C'étaient de bons combattants, et à ses yeux bien meilleurs que la plupart des autres Hommes.

Son regard expert remarqua tout de suite le jeune Dúnadan inexpérimenté, et les quelques maladresses de ses gestes. Elle l'observa frapper le mannequin d'entraînement avec application et sérieux, visiblement déterminé à progresser. La sylvaine esquissa un petit sourire : elle aimait les acharnés. Elle vint se planter près de lui en dégainant ses armes. Le jeune homme la regarda avec un air étonné, et quelque peu intimidé.


- Vous progresseriez plus rapidement face à un adversaire d'expérience qu'en frappant un mannequin, fit Laegwing. Entraînez-vous avec moi.
- C'est que... entama timidement le Rôdeur, j'aurais peur de vous... blesser.


Laegwing leva les yeux au ciel, et pour toute réponse, vint brusquement porter un coup d'épée inattendu, dirigé vers le visage de l'homme. Celui-ci para de justesse en écarquillant les yeux avec sa propre épée longue.


- Entraînez-vous avec moi, répéta-t-elle.


Le Rôdeur ne répéta pas deux fois la même ânerie et prit son bouclier rond posé un peu plus loin, avant de se mettre en garde face à l'Elfe. Celle-ci n'y alla pas de main morte et entama subitement sa danse d'acier, repoussant le jeune homme dans ses retranchements, et ignorant la douleur à son épaule. Il se protégeait autant que possible avec son bouclier, mais était contraint de laisser pour seul usage à son arme la parade. Peu à peu, il reculait, une goutte de sueur perlant sur son front. Laegwing veillait à ne pas le blesser, retenant au dernier moment les coups qui auraient pu être dangereux, mais continuait impitoyablement son attaque.

Elle avait un style de combat extrêmement offensif, qui seyait parfaitement au port de deux armes. La moindre attaque était un assaut, un déluge de coups. Elle ne laissait jamais respirer son adversaire et tâchait toujours de faire naître la crainte en lui, et c'était une tactique qui fonctionnait : dès qu'un adversaire commençait à la craindre, il avait perdu. Elle se servait de tout son corps, et ses jambes suivaient la même danse que ses lames. Elle utilisait son poids et sa souplesse pour rendre chacun de ses coups plus efficace. Chaque mouvement avait un but, aucun n'était inutile. Pour s'adapter à son propre style de combat, elle avait développé rapidité, agilité et endurance, et sa fierté et son acharnement achevaient le tableau et faisaient qu'elle était très rarement la première à se fatiguer. Sa puissance brute n'avait rien d'exceptionnel (elle était bien moindre que celle de la plupart des Elfes mâles), mais son offensive et la précision de ses gestes la compensaient. De plus, elle jouait énormément sur la psychologie de son adversaire. C'était une méthode de se battre à la fois sauvage, brutale, fine et réfléchie.

Elle cessa son assaut, laissant respirer le Rôdeur qui reprit son souffle en la regardant avec une crainte mêlée de respect.


- Face à un adversaire qui manie deux armes, soyez toujours attentif. Une attaque en cache une autre, tout n'est que feintes.


Le Rôdeur hocha la tête.


- Servez-vous plus de votre corps. Votre épée et votre bouclier ne sont pas vos seules armes. Un coup de pied inattendu peut vous donner l'avantage, par exemple. Dans un combat réel, ce n'est pas la noblesse et la beauté des gestes qui importent le plus.
- Je tâcherai de me souvenirs de vos conseils, Hiril. Merci.


Laegwing inclina la tête et rengaina ses armes. Elle continua à veiller les entraînements des Rôdeurs d'un œil attentif durant l'après-midi. À présent, nul ne la prit pour autre chose qu'une militaire, et chacun redoubla de soin dans ses coups, conscient qu'une paire d'yeux perçants observait les moindres gestes effectués. Elle offrait parfois un duel à un Dúnadan qui désirait vérifier sa progression.

Elle se sentait dans son élément ainsi. La sylvaine commençait à prendre de l'âge et sentir le désir de partager son expérience. Elle se plaisait à former ceux qui le voulaient, à leur enseigner ce qu'elle avait elle-même appris il y a plusieurs millénaires. C'était un professeur dur et rigoureux. Elle prônait l'acharnement et la ténacité dans l'apprentissage et ne faisait jamais de cadeaux à ses élèves, tâchant sans cesse de les pousser dans leurs retranchements et de repousser leurs limites, qu'ils fussent elfes ou humains.

La volonté de transmettre était assez récente chez cette Elfe qui, à plus de quatre mille ans, considérait qu'elle avait toujours fort à apprendre et qui ne tenait rien pour acquis. Était-ce signe de la sagesse qui s'installe ? Ou l'augure des derniers grains de sable s'écoulant dans le sablier d'une vie en ces terres arrivée à son ultime tournant ?

Le soir venu, elle partagea un repas avec Ilsaiel et les Dúnedain. Elle demeura assez silencieuse et les Rôdeurs la laissèrent en paix, ce dont elle les remercia intérieurement. Elle ne tarda pas à prendre le plus discrètement et courtoisement possible congé de ses hôtes pour aller contempler le lac Nenuial, luisant féeriquement sous la voûte étoilée. La faible brise du soir créait de douces ondes à la surface de l'eau, et l'air était empreint d'une fraîcheur délicieuse.

Le lac d'Evendim respirait la sérénité et la majesté, et Laegwing ne se lassa pas de laisser courir ses yeux sur sa surface étincelante, et d'offrir à ses fines oreilles le son exquis du clapotis de l'eau. Elle resta ainsi, droite et immobile comme une froide statue, de longues et longues heures, jusqu'à ce qu'Arien la brûlante, terrible et splendide, fasse apparaître l'éclat rougeoyant d'Anor à l'horizon.

Ilsaiel vint la chercher pour vérifier l'état de sa blessure à l'épaule. Elle défit le bandage avec soin et délicatesse.


- Vous guérissez vite, fit Ilsaiel en inspectant la plaie avec un léger sourire. Je reste encore incapable de dire si c'est dû à une réelle résistance physique, ou si votre volonté fait tout le travail.
- Ou peut-être simplement que vos bons soins sont efficaces, répondit Laegwing, ce qui fit rire la guérisseuse.


Elle nettoya à nouveau rapidement la blessure, avant d'y appliquer le même onguent qu'auparavant, et de refaire méticuleusement le bandage avec du linge propre. Laegwing revêtit à nouveau ses protections. Elle semblait avoir hâte de partir et Ilsaiel le nota bien.


- Attendez le crépuscule, dit Ilsaiel, même si votre impatience de nous quitter grandit. Le couvert de la nuit vous sera favorable, et vous aurez l'occasion de récupérer encore un peu. Même si je sais qu'en restant aujourd'hui, vous passerez votre temps à assister les Rôdeurs s'entraînant.


Laegwing hocha simplement la tête et remercia la Teler des soins prodigués. Il lui restait la journée avant de continuer son périple vers le Nord, et elle voulait la passer à améliorer les chances des Dúnedain de préserver leur héritage. Ainsi continua-t-elle à les entraîner, à leur prodiguer conseils de sa voix profonde, et pratique de ses coups précis. Elle écouta leurs plans, donna son avis, suggéra certaines choses. Sa journée fut militaire, et ça lui convint parfaitement.

La Soleil, lentement, déclinait.

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Message par Laegwing Lun 19 Déc - 6:34

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Le Dernier Virage


Le crépuscule vint, et avec lui, l'heure de repartir pour Laegwing. Elle avait rassemblé son maigre bagage, et les Rôdeurs avaient généreusement renouvelé ses provisions et fourni de nouvelles flèches pour compenser celles perdues.

Ilsaiel vint la trouver devant le grand pont joignant Tinnudir au reste de l'Evendim. Elle avait toujours son sourire avenant, qui auréolait son visage d'encore plus de douceur.

- Vous voilà au départ, dit-elle de sa voix mélodieuse. Je pense que vos conseils et vos démonstrations manqueront aux Dúnedain d'ici.
- Les Dúnedain sont déjà d'excellents combattants, répondit modestement Laegwing. Vous leur êtes bien plus nécessaire que je ne le suis.

Ilsaiel fit un de ses sourires avant de poursuivre.

- Prenez garde au Nord. Le vent est bien plus froid qu'il ne devrait l'être. Il se murmure qu'au Forochel, les bises n'ont plus été aussi glaciales depuis longtemps.
- Je crains plus pour Faradêl que pour moi-même, dit la guerrière en observant le loup d'un regard inquiet. J'ai pris de quoi le couvrir au mieux, mais je crains que ce ne soit suffisant. Il me faudra là-bas lui trouver un abri où il devra rester, le temps que je fasse ce que j'ai à faire.
- Puissiez-vous en sortir indemne et revenir entière aux vôtres.


Laegwing ne répondit rien à cela. Ilsaiel l'observa finement pendant quelques secondes.


- Il y a une flamme brûlant dans vos yeux, reprit la Teler, que beaucoup des nôtres ont déjà perdu. Vous êtes encore profondément reliée à ces terres, Laegwing. (Celle-ci haussa un sourcil surpris : elle ne s'était pas présentée, désirant garder son identité pour elle. Ilsaiel fit un sourire malicieux.) Il vous reste trop à faire pour tomber maintenant, et l'heure n'est pas encore venue pour vous de faire voile vers l'Ouest. Vous reviendrez du Nord, et alors, nous nous rencontrerons à nouveau.


Laegwing fit silence un instant.


- Puissiez-vous avoir raison, autant sur ce que vous dites à mon sujet, que sur l'éventualité de notre prochaine rencontre, dit-elle finalement.
- Nai autuvalyë séressë, Laicawinga*, salua solennellement Ilsaiel dans la vieille langue des Noldor, car ceux-ci furent ses amis. Que le feu qui vous anime vous préserve du froid du Forochel ; car il est acéré, même pour les Eldar.
- Márienna*, Ilsaiel !


Les adieux échangés, toutes deux inclinèrent gracieusement la nuque, avant que Laegwing ne prenne à nouveau et finalement la route, sous le regard astral de la gwanwen. Rapidement elle quitta le chemin tracé, lui préférant les collines sauvages et dépeuplées de voyageurs. Elle respira à pleins poumons l'air frais du soir, qui émanait de l'herbe humide, heureuse de marcher à nouveau avec pour seule et silencieuse compagnie Faradêl.

Le chemin lui devint moins connu, car elle n'avait encore jamais arpenté le Nord de l'Evendim. Toutefois, comme une majorité d'Elfes Nandor, elle avait un excellent sens de l'orientation et n'avait pas de peine à se diriger où elle le voulait dans un endroit qui lui était inconnu. De son père elle avait appris la science des étoiles, qui toujours avaient guidé les voyageurs. Mais le ciel lui était voilé, et elle dû user de ses talents de pisteuse pour se frayer un chemin dans la bonne direction.

Les collines étaient abruptes, rocheuses et glissantes, et la progression s'avéra difficile. Laegwing contourna soigneusement les ruines dressées sur la route, car elles étaient peuplées d'hommes qui n'étaient pas des Dúnedain. Dans la nuit noire, elle ne se fit pas remarquer par quelque créature que ce soit.

Après avoir contourné ces hautes collines, les montagnes du Nord lui apparurent clairement, si proches à présent, lui imposant leur froide vision. Une bouffée d'angoisse saisit la sylvaine à leur vue. Son voyage touchait à son terme, et elle ne savait ce qui en ressortirait au bout. Elle, impitoyable guerrière, puits de force et de courage, était prise par une peur indicible, qui se répandait dans toutes ses veines comme un vent glacé. Un moment, même, elle arrêta son pas, contemplant ces hauteurs cruelles, incapable d'aller plus avant. Pendant tous ces jours, elle avait tâché au mieux de fermer son esprit aux pensées venimeuses qui ne demandaient qu'à éclater, l'inonder et la consumer de chagrin. Mais une fois dans le Forochel, elle savait qu'elle ne pourrait y échapper.

Elle devrait affronter la pointe des épines à l'aube.


Elle ferma ses yeux quelques instants, s'efforçant de reprendre le contrôle de son corps et de sa respiration. Quelques minutes ainsi s'écoulèrent durant lesquelles Laegwing luttait contre elle-même pour retrouver le courage et la force mentale si caractéristiques de sa personne. Quand elle fût de nouveau prête, et que le masque d'acier eut retrouvé sa place sur son visage, elle poursuivit son chemin.

Les derniers miles la séparant des froides terres du Nord furent les plus difficiles. Elle commençait à percevoir des arbres couverts d'une fine couche de neige. La passe qui reliait les deux régions lui sembla si proche, qu'elle du faire appel à toute sa force d'esprit pour continuer sa route.

Elle franchit bientôt la passe. Plus elle progressait, plus le temps se faisait froid. Elle ne tarda pas à apercevoir çà et là quelques fines couches de neige. Parfois, une plaque de verglas crissait sous son pas. La respiration de Laegwing et Faradêl commença à laisser une buée blanche derrière eux.

Elle continua sa route malgré son cœur qui se serrait un peu plus à chaque pas. À l'aube, enfin, elle atteint les premiers bois du Forochel, dans leur manteau de neige et de givre. Et jamais sa peur ne fut plus forte, car le dernier virage était passé.

Un vent froid l'accueillit de face, comme geste cruel et ironique de bienvenue sur les terres où elle trouverait sans doute le désespoir.



[* Nai autuvalyë séressë, Laicawinga. --> "Puisses-tu vivre en paix, Laegwing."
Márienna ! --> "Vers ce qui est bon !"]


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Message par Laegwing Ven 6 Jan - 20:17

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Présent


Laegwing avançait doucement dans les bois. Il régnait une atmosphère quelque peu oppressante et angoissante, dans un mélange de silence étouffant et du sifflement du vent, grincement des pins et crissement de la neige sous les pas. L'air épuré et glacé brûlait les poumons. Parfois, la neige s'amassait en traîtresses congères, ce qui causait plus souci à Faradêl qu'à l'Elfe qui, comme tous les siens, avait le pas très léger.

Il plut à Laegwing qu'elle ne fût pas humaine, car le froid l'aurait mordue aussi vivement que la mâchoire acérée d'un fauve, bien que les bois de Taur Orthon protégeassent fort bien du vent glacial ; mais à découvert sur la baie, des miles au-delà, la guerrière savait qu'elle risquerait de le ressentir, toute Elfe qu'elle fût.

Son pas se fit lent quelques temps, découvrant pour la première fois les forêts enneigées septentrionales. Elle avait rêvé de les pénétrer, voilà des lunes plus tôt ; quelle ironie qu'elle y marchât aujourd'hui en quête de funestes nouvelles ! Néanmoins, elle continua d'avancer, son regard de jade coulant toujours vers le Nord. Elle apercevait de temps à autres d'énormes élans, qui grattaient le sol de leurs sabots fendus à la recherche d'une maigre végétation, où arrachaient par fins lambeaux l'écorce des arbres. Elle ne les aperçut que rarement, mais n'ignorait pas que les loups étaient légion par ici, pourvus de pelages blancs ou gris, et Faradêl se montra tendu.

Plusieurs heures s'écoulèrent ainsi. Paradoxalement, le paysage fut aussi varié qu'invariable, et les pensées de Laegwing jonglèrent entre l'affût curieux et la perdition méditative. Aux alentours de midi, l'air qu'elle huma se fit plus frais et épuré – si c'était possible, et elle ne tarda pas à apercevoir un grand lac fumant de froid. Il était vaste et sombre, entre le bleu-vert et le gris ardoise, parfois auréolé de bleu de givre. Fascinée, la sylvaine s'en approcha et s'accroupit près des ondées, avant d'ôter un gant et d'y plonger la main. L'eau était vraiment glacée et elle-même le ressentit.

Un cri rauque retentit non loin. Ôtant vivement sa main de l'eau, Laegwing tourna la tête dans la direction du hurlement, et ses yeux d'Elfe aperçurent sur une autre berge un homme tout de fourrures vêtu, aux prises avec un monstre qu'elle ne pensait pas croiser dans ces terres pures et préservées. Un ouargue. Mais l'ouargue le plus gros qu'il lui eût été donné de croiser, au pelage immaculé. Il tenait entre ses mâchoires énormes le bras de l'homme.

Elle réagit promptement et en quelques amples foulées, suivies de la course de Faradêl, elle arriva à portée de tir. À chaque seconde, l'ouargue blessait un peu plus l'humain qui tentait désespérément de se défendre, tandis que son bras ne ressemblait plus qu'à un amas de chairs sanguinolentes. Laegwing encocha une flèche et rapidement, la décocha, atteignant la bête à la tempe. Dans un couinement strident, celle-ci lâcha l'humain, et en quelques secondes expira son dernier souffle putride.

L'homme resta quelques instants éberlué, le souffle rauque de temps à autres ponctué d'un gémissement plaintif, à fixer avec des yeux écarquillés le cadavre de l'ouargue dont la tête était transpercée d'une longue flèche à l'empennage vert. Il s'attarda sur celle-ci avant de tourner la tête en direction de Laegwing, plissant les yeux pour mieux la voir. L'Elfe resta immobile, hésitant entre s'approcher de l'homme, et poursuivre sa route. Le laisser là, blessé, après l'avoir sauvé était néanmoins cruel, et elle opta pour la première option.

Elle avança lentement vers lui, Faradêl sur les talons, et l'homme eut un sursaut de recul en le voyant. Elle esquissa une grimace en voyant l'état de son bras, littéralement charcuté, dont elle doutait fortement qu'il puisse en retrouver un jour l'usage. Tandis que Faradêl reniflait le cadavre de l'ouargue, avec force grognements, l'homme et l'Elfe s'observèrent en silence quelques instants. Laegwing finit par tendre une main secourable au blessé, qui la saisit de son bras valide pour se remettre sur pieds. Il était aussi grand qu'elle, et puissamment bâti, couvert de cuir et de fourrures ; des boucles brunes et sales chutaient sur ses épaules. Elle remarqua qu'il était également blessé à la hanche, et les traces de sang sur la pierre dressée derrière lui indiquaient qu'il avait du s'y cogner en chutant. Tournant son regard vers le cadavre du monstre, elle nota aussi la lance brisée plantée dans le flanc de l'animal.

Le nordique inclina gauchement la tête en murmurant plusieurs fois un même mot dans sa langue, qu'elle supposa signifier « merci ».


- Nom être Harcoojään, dit l'homme des neiges d'une voix rauque ; il n'avait visiblement pas l'habitude de parler ouistrain, et son accent était difficile à comprendre. Quoi nom vous être ?
- Laegwing, répondit celle-ci.
- Merci, Läewingi, fit maladroitement Harcoojään. Moi chasseur, mais hirviö (il désigna l'ouargue) surprendre moi, lui...


Ses explications furent néanmoins interrompues par des éclats de voix. Tournant la tête, Laegwing aperçut un groupe de lossoth, sans doute d'autres chasseurs (armés de lances et d'arcs grossiers), qui arrivaient dans leur direction. Apercevant Harcoojään et son bras mutilé, ils se précipitèrent dans sa direction et menacèrent l'Elfe de leurs lances. Celle-ci ne bougea pas d'un poil, mais Faradêl grogna.

Le blessé leur parla dans sa langue, et ils abaissèrent leurs armes, considérant désormais la guerrière d'un regard partagé entre respect et reconnaissance. Ils la jaugèrent d'un air curieux, s'arrêtant sur ses vêtements étranges et extrêmement remarquables dans le paysage immaculé. La seule femme du groupe, beaucoup plus imposante que la plupart des humaines qu'avait rencontré Laegwing, s'occupait à enrouler des bandes de peau autour du bras de Harcoojään.


- Moi vouloir... vouloir merci vous, reprit le blessé à l'intention de l'Elfe, soutenu par ses compagnons. Donner vous cadeau. Vous suivre nous, camp, moi donner vous cadeau pour merci.
- Il n'est nul besoin de me récompenser, chasseur, répondit Laegwing.


Les lossoth plissèrent les yeux. Le langage soutenu de la sylvaine leur était ardu à saisir, mais néanmoins ils comprirent l'idée, et Harcoojään reprit.


- Tradition peuple, vous sauver vie moi, moi donner vous cadeau.


Laegwing poussa un léger soupir, et finit par acquiescer. Deux hommes vinrent soutenir leur camarade souffrant, et le groupe commença à marcher doucement, regardant prudemment les alentours, au cas-où d'autres ouargues ne surgissent. L'Elfe encocha simplement une flèche pour indiquer qu'elle veillait. Le groupe se dirigea vers l'Est, longeant les rives du grand lac. Une heure plus tard, ils arrivèrent en vue d'un campement lossoth. Des tentes en peaux étaient dressées sur des défenses gigantesques , de maigres palissades de bois et de cuir étaient érigées tout autour, dans une protection minimale. De la fumée s'élevait de plusieurs feux.

Le groupe pénétra le camp. Les regards des habitants étaient partagés entre l'inquiétude à la vue de Harcoojään, et la méfiance vis-à-vis de Laegwing et du loup. Le campement fourmillait d'activité, et plusieurs groupes d'hommes et de femmes se partageaient les tâches. Là, on tannait des peaux, ici on écorchait une bête, ailleurs on s'entraînait à la lance ou à l'arc, ou on faisait fondre de la neige. Laegwing apprécia le mode de vie des lossoth, qui ne pensaient qu'à leur survie. On mena Harcoojään jusqu'à une tente, de laquelle sortit une femme qui se précipita vers le blessé, avec une mine horrifiée. Sans doute était-elle sa femme. Ses longs cheveux ondulés étaient aussi blonds que ceux de son mari était bruns. Elle était plus petite et plus fine que la plupart des femmes du camp. Ils échangèrent quelques courts instants, puis la blonde rentra à nouveau dans la tente, avant d'en ressortir un peu plus tard avec un sac. Harcoojään invita Laegwing à la rejoindre, ce qu'elle fit d'un pas légèrement ennuyé.


- Moi présenter vous femme moi, nom elle être Valjeta, fit le blessé en désignant sa compagne blonde.


Celle-ci esquissa un timide sourire à Laegwing, qui remarqua qu'elle ne devait pas avoir plus de dix-huit ans, quand son époux semblait en avoir quinze de plus. Intriguée par un souffle de vie qu'elle sentait émaner de la blonde, elle abaissa son regard vers son ventre, qui s'avéra être légèrement rebondi.


- Valjeta attendre enfant nous, reprit Harcoojään avec un air de fierté. Enfant futur être homme vigoureux, grand chasseur, moi sûr.
- Puis-je ? Questionna Laegwing en désignant le ventre de la jeune femme, qui hocha la tête.


Elle retira son gant et posa sa main sur le ventre de Valjeta, et le sourire amusé qui étirait les lèvres de l'Elfe étonna et intrigua le couple face à elle.


- Pourquoi vous sourire ? Quoi être amusant ?
- Il y a deux enfants, répondit simplement Laegwing en ôtant sa main. Un garçon et une fille.


Le couple échangea un regard éberlué.


- Comment vous savoir ?


Laegwing fit un simple bref sourire en guise de réponse. Le chasseur blessé toussa, tandis que sa femme retirait de son sac de quoi soigner son mari. Elle enleva les peaux imbibées de sang qui entouraient le bras mutilé, et découvrit avec une grimace l'état de celui-ci. Tandis qu'une autre jeune femme lui amenait une bassine de neige fondue, elle s'occupa consciencieusement de nettoyer les plaies béantes.


- Quoi vous amener ici ? Vous être étran...


Il s'interrompit néanmoins d'un affreux hurlement quand sa compagne fit couler de l'alcool sur ses plaies. Quelques larmes de douleur roulèrent sur ses joues. Le spectacle n'arracha pas l'ombre d'une grimace à Laegwing, qui répondit comme si de rien n'était.


- Des affaires personnelles me mènent par ici. Je dois aller plus loin au Nord. Sur la baie.


Le chasseur prit le temps de reprendre contenance avant de poursuivre la conversation.


- Ici être moins froid que sur baie, reprit-il dans un souffle rauque. Baie gelée, baie dangereux.


Il grimaça en sentant l'aiguille de sa femme recoudre ses plaies.


- Je m'en accommoderai fort bien, poursuivit Laegwing.
- Dans ce cas moi donner vous cadeau utile sur baie.


Valjeta poursuivit ses soins, étalant sur le bras un onguent, avant de faire un bandage serré, et se rinça les mains avant de s'essuyer le front. Elle s'occupa ensuite de la hanche de son compagnon, avant de ranger ses affaires. Harcoojään lui demanda quelque chose, et elle entra dans la tente, avant d'en ressortir une minute plus tard en portant une lourde, longue et large cape de fourrures blanches et de cuir tout aussi décoloré. Le travail était simple mais soigné, et les fourrures vraiment somptueuses et immaculées.


- Baie très froide, cape tenir vous chaud. Et vêtements vous trop visibles, eläimet... (il hésita un instant, cherchant le mot ouistrain dans sa mémoire) … bêtes voir vous de loin, attaquer vous souvent. Sur baie avoir loups, loups comme loup vous ou loup comme loup attaquer moi, ours, et kalpa-kita. Nom eux vouloir dire « épées dans bouche ». Eux avoir longues, longues dents.


Laegwing accepta le présent en inclinant la tête. Elle l'appréciait, non pas pour la chaleur qu'il pouvait offrir, mais plus pour le camouflage. En effet, ses vêtements vert sombre étaient trop aisément repérables sur ces terres. Elle se saisit de la cape, douce au toucher. Elle ôta son arc, son carquois, son paquetage et sa propre pèlerine avant d'enfiler la pelisse blanche. Elle était suffisamment longue pour couvrir ses jambes, et assez large pour qu'elle puisse s'y emmitoufler totalement, fermée par des attaches en cuir blanc. Une ouverture était faite sur les côtés pour qu'elle puisse extraire ses bras. La cape était également dotée d'une capuche douillette.

Elle s'observa un instant, appréciant l'immaculé pur de la fourrure, et inclina à nouveau la tête en guise de remerciement. Le couple la regarda d'un air légèrement impressionné, l'épaisseur de la cape la rendant plus imposante, et sa blancheur la faisant paraître sépulcrale, ceci accentué par la pâleur de son teint.

- Vous rester ? Vous doit être fatiguée voyage, vous dormir et manger ?
- Je dois reprendre ma route, répondit Laegwing. Il me reste encore du chemin à parcourir, et je ne puis m'attarder.


Harcoojään hocha la tête et dit quelques mots à ses compagnons. Ils revinrent avec quelques provisions qu'ils lui offrirent généreusement, et qu'elle rangea dans son paquetage avec son ancienne cape après les avoir remerciés.

Avant qu'elle ne quitta le camp des lossoth, Harcoojään vint la trouver, le bras en atèle.


- Vous pas connaître ici. Si vous aller Nord, faire attention à crevasse, dit-il. Vous devoir passer par tunnel de glace. Tunnel dangereux, hommes dangereux habiter tunnel, vous faire attention.
- Je vous remercie de ces indications, Harcoojään, fit Laegwing en inclinant la tête. Puisse votre bras se remettre et porter à nouveau une lance digne de vous.


Sur ces derniers mots, elle reprit la route, alourdie par sa nouvelle cape, mais dissimulée des yeux curieux des créatures des terres du Nord.



_________


[HRP*] Ayant remarqué que la quasi totalité des noms utilisés dans le jeu au Forochel sont tirés du finnois, j'ai utilisé cette langue ici pour donner un peu plus de réalisme. Ainsi, le nom du chasseur blessé, Harcoojään, signifie "Fend la glace", et celui de sa femme, Valjeta, "Aurore" ou "Aube". Le mot Hirviö utilisé pour décrire l'ouargue signifie "monstre".

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Message par Laegwing Mer 18 Jan - 15:53

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Blanc comme la mort


L'après-midi touchait à sa fin lorsque Laegwing laissa derrière elle le lac et les bois de Taur Orthon, amenant avec lui un froid encore plus mordant. La pâle soleil déclinait, promesse d'une nuit de givre et de brume. Le chemin se traçait de lui-même, large mais dégagé, entre deux reliefs pierreux, ce qui dérangeait l'Elfe : cette passe obligatoire vers le Nord pouvait avoir des chances d'être empruntée par d'autres. Les arbres et la végétation se firent de plus en plus rares, et la glace plus aveuglante à mesure que les lieues défilaient. Le chemin montait progressivement, obligeant les jambes à forcer dans la neige et le verglas pour avancer ; et en une heure de temps, le ciel se fit d'un gris perle, et quelques flocons commencèrent à danser dans le vent.

Laegwing parvint au sommet de la pente, et devant elle s'étendait, sinueuse et escarpée, une profonde crevasse de glace. De là où elle était, elle pouvait entendre le vent mugir et les parois gronder, dans un concert oppressant et inquiétant. Malgré tout, elle avança, et, prudemment, descendit une pente qui menait à la faille de givre. Faradêl marchait tête et queue basses, peu rassuré par cet environnement inhabituel et inhospitalier.

La fente était encore plus impressionnante vue de l'intérieur, et, du point de vue de la sylvaine, tout à fait fascinante. Les grondements de la glace lui donnaient la nette sensation que ce lieu avait une vie propre, comme autant d'avertissements au voyageur indésirable : « Je peux me refermer sur toi. » Elle voyait la crevasse comme une bouche à l'haleine glacée, aux dents acérées et aux lèvres striées d'engelures, qui ne demandait qu'à happer ce qui lui passait imprudemment entre les mâchoires.

Le vent mugissait avec violence, canalisé par le lit de glace ; il était de face, et soufflait très fort, et, toute Elfe qu'elle fût, Laegwing sentit ses yeux s'embuer à cause du froid. La progression s'annonçait extrêmement difficile, la bise gelée semblant vouloir repousser les deux marcheurs de toutes ses forces, et l'empêcher de traverser, comme si la gueule craignît qu'on atteigne sa gorge. Tant la guerrière que le loup tinrent bon, toutefois, et, lentement, pas à pas, luttèrent contre le vent et les flocons qui fendaient l'air comme des fouets pour avancer.

Au crépuscule tombant, les compagnons frôlèrent le drame. Un énorme bloc de glace se détacha de la paroi pour venir s'écraser sur eux, et n'aurait pas manquer de broyer Faradêl sous lui si celui-ci n'avait eu assez d'instinct et d'agilité pour l'éviter à temps. La crevasse apparut comme définitivement hostile à Laegwing, et elle se mit à murmurer des paroles dans sa langue natale, noyées sous le bruit du vent et des profondeurs de la glace ; leurs mugissements et grondements étaient plus forts, de plus en plus forts, comme un défi lancé à l'Elfe d'oser répondre encore, et celle-ci scanda ses mots vers les cieux, qui apparurent tant comme une prière que comme une réplique. Ils résonnèrent délicieusement dans les courants violents, se heurtaient aux parois, mais, toujours, flottaient dans les airs, victorieux. La lutte dura encore un moment, le vent se faisant infiniment plus violent, à tel point que les compagnons en furent presque immobilisés, cinglés par l'air tranchant et les flocons compacts comme de fins grêlons. Mais Laegwing persista, continua d'avancer obstinément. Une demie-heure passa ainsi, et le vent sembla tomber d'un coup. Il se fit plus accueillant, et commença à amorcer un changement de direction, ce qui facilita beaucoup l'avancée dans la gueule givrée.

La nuit s'installait doucement quand l'Elfe pénétra dans le fameux « tunnel » indiqué par Harcoojään et qui achevait la crevasse. L'intérieur était très sombre et surtout, très brumeux, en raison des vapeurs de glace qui émanaient du sol et des parois. Elles émanaient même parfois, en espèces de petits geysers, de fissures étroites. Le vent ici ne mugissait pas, mais devenait strident. Quelques cristaux de glace, brillants et tintant tombaient parfois en stalactites délicates, venant ajouter une note mélodieuse et rassurante dans cet environnement inquiétant. Toutefois, Laegwing percevait une menace dans ce tunnel, une menace qu'elle ne parvint pas à identifier tout de suite en raison du bruit constant.

Elle ne tarda pas à en découvrir la nature une bonne heure de marche plus tard, en plein cœur de la caverne : des hommes d'une taille imposante, très puissamment bâtis, couverts de peaux de loups dont les gueules aux crocs conservés servaient de capuches. Ils paraissaient bestiaux, primitifs et tribaux, et parcouraient silencieusement le tunnel comme des prédateurs à l'affût. À l'affût de quoi, elle ne pouvait le dire, et sa seule hypothèse était : de malchanceux voyageurs à dépouiller. Aussi se fit-elle la plus discrète possible, emmitouflée dans ses fourrures immaculées et longeant les parois.

Mais elle ne pût éviter l'affrontement, la grotte se faisant trop étroite pour contourner ceux que l'on nommait les Gauredain. Un groupe de trois d'entre eux, armés de lourdes lances grossières, jaugèrent l'Elfe et le loup. Laegwing se tint sur ses gardes, les mains sur les poignées de ses épées, crispée ; mais les Gauredain lui cédèrent finalement le passage, leurs regards centrés sur Faradêl. Elle songea qu'ils respectaient sans doute ceux qui savaient apprivoiser les loups. Elle put ainsi poursuivre sa traversée sans être gênée de ces hommes primitifs.

Le terrain se fit beaucoup plus escarpée, et il commençait à monter. La grotte plaçait parfois des murs de glace au milieu du chemin, scindant celui-ci en plusieurs voies qui conduisaient pour certaines à des impasses ou des précipices. L'Elfe dut plusieurs fois rebrousser chemin pour prendre une autre route. Ce n'est qu'au bout de deux ou trois heures de marche supplémentaires, qu'elle atteignit enfin le bout du tunnel.

Le spectacle sur lequel elle tomba en quittant la grotte la laissa sans voix. La neige avait cessé de tomber, et le vent avait dégagé les nuages. Dans le ciel ondulaient des vagues de lumière verte, d'un vert pur et lumineux comme il n'en existerait jamais sur la terre ferme. Les cieux étaient parcourus de ces serpents colorés, qui semblaient migrer vers une destination connue que d'eux seuls, dévoilant en paradant toute leur magnificence et leur majesté. Sous eux, la neige s'étendait en une étendue gigantesque, propageant toute sa blancheur étincelante à l'horizon. Le vent soulevait parfois une gerbe de flocons fraîchement tombés, en amassait d'autres en épaisses congères. Tant la neige du sol que la glace des reliefs reflétaient légèrement les vertes ondulations des cieux, rendant tout le paysage d'une indescriptible et froide beauté.

Laegwing n'aurait su dire combien de temps elle était restée à admirer le spectacle. Dix minutes, une demie-heure, une heure, peut-être plus ? L'aurore boréale était trop belle et trop puissante pour se laisser camoufler de la brume de l'Elfe, et chassait celle-ci sans ménagement. C'est d'un pas plus léger malgré un soupçon de fatigue, et l'esprit enchanté par les merveilles du Nord, que la sylvaine poursuivit sa route. Les serpents de lumière verte repoussaient l'échéance, lui offraient un ultime moment de bien-être avant que l'aube traîtresse ne la pique de ses épines venimeuses.

Après quelques dizaines de minutes de marche silencieuse, une agitation curieuse et inquiète de Faradêl l'intrigua. Son nez les mena à une des plus belles créatures qu'il eût été donné à Laegwing d'observer. C'était un félin d'une taille tout à fait imposante, recouvert d'une fourrure épaisse et immaculée ; sous la robe saillaient des muscles puissants et développés, qui roulaient à chaque mouvement furtif du fauve. Il ne possédait qu'une queue très courte, qui laissait penser qu'il n'était que peu adapté pour la course, et devait sans doute surprendre ses proies pour les tuer. Le plus impressionnant et significatif restait ses canines supérieures, incroyablement longues, qui émergeaient devant la mâchoire inférieure comme des couteaux. Laegwing comprit qu'il s'agissait là des fameux kalpa-kita qu'avait mentionné Harcoojään, les créatures qui avaient des « épées dans la bouche ». La créature mêlait la grâce et la beauté sauvage dans toute sa splendeur, alliée à une force de prédation saisissante. Puissante et discrète : elle maîtrisait les étendues glacées.

Pour éviter d'avoir à abattre une si belle bête, et aussi empêcher le téméraire loup qui lui servait de compagnon de vouloir se confronter à elle, l'Elfe prit soin de la contourner. Elle distingua au loin les palissades caractéristiques que confectionnaient les lossoth, et qui protégeaient un campement juché sur une hauteur. Elle prit soin d'éviter le camp : l'urgence la rattrapait, et elle désirait au plus vite atteindre les eaux que cerclait la baie.

Ce n'est que quand le ciel se teignit de parme, et toujours serpenté de vertes ondulations, que Laegwing atteint enfin son but. Devant elle, un pan de mer inondait l'horizon, d'un gris ardoise parsemé des couleurs pastel des cieux étoilés. Des icebergs flottaient çà et là, ajoutant une touche de blanc de givre au tableau. Aussi loin que ses yeux d'Elfe pouvaient voir, le paysage était ainsi.

Qu'avait-elle attendu, au juste ? Un bateau échoué sur ces rives, les corps des siens, des traces précises de leur survie ? La baie était si vaste, et la mer plus encore ; que pouvait-elle trouver, que pouvait-elle seulement chercher ?

Un profond malaise teinté de désespoir la saisit ; elle comprit que son voyage n'avait été qu'une fuite, une fuite pour échapper temporairement à la douleur qui ne manquerait pas de la saisir. Une fuite tâchée d'un espoir fou de trouver quelque chose qui la fasse revenir vers la lumière. D'Est en Ouest, jusqu'au Nord, tout n'était qu'étendue infinie d'eau gelée et de neige et de glace. Combien de lunes cela lui prendrait de parcourir intégralement les rives, de les passer au peigne fin ?

Ses yeux se tournèrent vers le campement des lossoth, à quelques lieues derrière elle ; sur ces hauteurs, n'avaient-ils rien vu ? Ils représentaient son dernier espoir d'apprendre quelque chose, de faire en sorte que ce voyage ne fût pas vain. Ainsi fit-elle demi-tour, le cœur si lourd qu'il lui semblait être lesté de plomb. À l'aube naissante, elle grimpa la pente glissante qui menait au camp, et les lossoth, reconnaissant la facture de la cape blanche, l'accueillirent parmi eux.

Ils n'étaient pas différents des hommes de Taur Orthon, si ce n'est qu'ils paraissaient plus durs, froids et méfiants, sans doute à cause de leur environnement plus hostile et difficile qu'au sud boisé. Une femme en particulier, aux traits à la fois épais et acérés, se montra assez mal accueillante.

- Si vous cherchez l'hospitalité, un repas et un abri, il vous faudra nous rendre des services en contrepartie, étrangère, dit-elle d'une voix tranchante, dans un bon ouistrain.
- Je ne demanderai aucun des trois, répondit Laegwing. Je souhaiterais seulement une information ; cela nécessite-t-il également une contrepartie ?
- Peut-être bien que oui... entama la lossoth
- Il suffit, Kovaa, la coupa un vieillard. Les temps sont durs, mais pas au point de refuser de répondre à une question d'une étrangère ne réclamant que cela, et portant une cape confectionnée par les nôtres. Je vous écoute.


Visiblement, ces deux lossoth faisaient partie des rares à s'exprimer couramment en ouistrain. Les autres, autour, semblaient avoir beaucoup de mal à suivre.


- Je vous serais reconnaissante, entama Laegwing en prenant une inspiration, de me dire si vous auriez eu vent d'un bateau s'étant échoué dans vos eaux récemment.
- Bateau ? Vous voulez sans doute parler de ces monstres des mers, tout de bois faits. C'est aussi le nom qu'a utilisé cet étranger de votre espèce pour désigner le monstre.


Laegwing regarda le vieillard avec espoir.


- Un étranger de mon espèce ? Pouvez-vous m'en dire plus ?
- Eh bien, il s'est échoué sur nos rives, juché sur des débris de bois, à moitié mort de froid. Nous l'avons recueilli et soigné. Son nom était difficilement prononçable pour nous, mais il commençait par Selë quelque chose.


Laegwing fut déçue : il s'agissait sans nul doute de Seledhros, le messager venu apporter la mauvaise nouvelle à Imladris. Elle continua tout de même ses questions avec espoir.


- Était-il le seul ? Ici ou ailleurs en Forochel, les Lossoth n'ont-ils pas recueilli d'autres survivants ?
- Je n'en ai pas entendu parler, étrangère, répondit le vieillard, et je suis au courant de tout ce qu'il se passe dans ce pays. La mer nous a recraché beaucoup de morceaux de la carcasse du monstre des mers, par la suite, mais plus aucun autre étranger ne s'est échoué sur nos rives.


Ce fut un coup de poignard dans le cœur de l'Elfe, bien qu'elle s'y fut attendue. Ainsi, les derniers espoirs s'effondraient : il n'y avait plus la moindre chance de retrouver deux des Elfes les plus importants de son existence. Elle prit sur elle pour se contenir devant les Lossoth, bien que son âme toute entière se soit gelée, d'une glace encore plus froide que celle du Forochel.


- Merci d'avoir répondu à mes questions, homme des neiges. Je ne vous importune plus. Adieu.


Sans même attendre la réponse du vieillard, elle revient sur ses pas, et quitta le camp sans se retourner. Ses pas la menèrent instinctivement vers les rives de la mer. Là, elle se faufila sur une presqu'île de banquise, qui sinuait étroitement sur une bonne quinzaine de mètres. Elle se tint tout au bord, contemplant l'horizon, qui avait délaissé le parme pour de l'orangé. Elle nota que les aurores boréales avaient disparu, et que les nuages revenaient, en même temps que sa brume. Elle ôta lentement le bel anneau qui ceignait son annulaire, et le contempla, admirant les reflets de l'eau sur le bel argent elfique et les fines sculptures telerines qui l'ornaient.

Elle resta ainsi un bon nombre d'heures. Le matin s'écoula ainsi, et l'après-midi s'avança également. Faradêl, lassé et affamé, fouilla dans le paquetage que l'Elfe avait laissé sur la glace derrière elle de quoi manger. Mais elle, toujours, contemplait tantôt l'anneau, tantôt les vagues. Elle ne brisa sa méditation que pour couvrir Faradêl de sa cape en fourrure lorsque le vent se leva, avant d'en revenir à sa perdition. Elle demeura imperturbable face à l'air violent et glacé, qui ne tarda pas à amener de la neige, toujours perdue sans des pensées tumultueuses, l'œil cillant à peine. Ses cheveux couleur écorce, aux reflets cuivrés, cinglaient l'air et son visage, mais elle n'en avait cure. Le blizzard en devenir aurait pu lui donner froid, mais elle était trop perdue en elle-même pour le ressentir.

L'après-midi avait atteint son milieu lorsqu'une secousse légère fit trembler la glace sous ses pieds. Faradêl se campa sur ses pattes. L'Elfe, surprise, perdit un instant l'équilibre, et l'anneau qu'elle tenait dans ses mains, lui échappa, et, presque au ralenti, sombra dans les profondeurs ardoise de la mer. Elle fixa l'eau avec horreur : le destin s'acharnait-il sur elle ? Elle avait perdu son époux, et voilà que, ironiquement, le dernier souvenir matériel de lui s'évanouissait dans les flots glacés qui lui avaient coûté la vie. Elle ôta précipitamment ses gants, et plongea une main dans l'eau, avant de la retirer vivement : la mer au cœur de la baie était infiniment plus gelée que le lac de Taur Orthon, et le froid lui transperçait la peau. C'était un froid tel que même son espèce ne pouvait le supporter.

Elle resta un long moment ainsi, les yeux rivés sur l'eau qui avait englouti la bague, à se demander que faire. Tremblante, elle ferma les yeux et s'exhorta au calme. Les minutes passèrent, et des images lui vinrent, alors qu'elle ne cherchait qu'à se reprendre. Elle voyait un large détroit de glace, où les eaux gelées des mers s'engouffraient avec violence ; la banquise grondait de manière sourde, continuellement, tandis que les vents mugissaient en cris stridents. Une brume du froid le plus mortel qui soit recouvrait sinistrement le tout. Au cœur de tout ça, entre les pans de banquise qui s'entrechoquaient dans le courant, un groupe d'individus progressait. C'étaient des Elfes, désespérés et gelés jusqu'à la moelle ; ils étaient grands et beaux, et la lumière perlait dans leurs yeux, mais ils avaient tous une mine cadavérique. L'un d'entre eux s'effondra sur la glace, sous les cris désespéré d'un autre, mais le corps fut laissé en arrière. Vaille que vaille, puisant dans des forces insoupçonnées, le groupe avançait dans ce chaos de glace. Laegwing ressentait le froid de ce lieu, et il était incomparable à celui du Forochel : bien plus mortel et pénétrant. Il était tellement brûlant et acéré, qu'elle se demanda comment elle avait pu craindre celui des eaux de la baie.

Elle vit de plus près le visage d'un des Elfes. Des cheveux noirs cinglaient son visage carré et dur, et des yeux d'un bleu profond brûlaient de détermination autant qu'ils pleuraient de froid. Elle se sentit étonnamment proche de cet Elfe d'un temps ancien, d'un temps qu'elle n'avait pas connu – elle avait deviné qu'il s'agissait de la traversée de l'Helcaraxë par les Noldor, un de leurs plus grands exploits. Elle eût l'impression de connaître cet Elfe, de le connaître au plus profond d'elle, comme si son essence coulait dans ses veines.

L'instant d'un malaise, elle retrouva devant elle la mer gris ardoise qui avait englouti sa bague. Encore toute tremblante et suffoquée de la vision étonnamment réaliste qu'elle avait eu, de souvenirs qui ne lui appartenaient pas, elle resta un bon quart d'heure immobile et pantoise. Elle sentait au plus profond d'elle que cet Elfe aux cheveux noirs et aux yeux bleus était un de ses ancêtres – sans aucun doute le père de sa mère. Il avait traversé le pire froid qui pouvait exister dans ce monde, les glaces les plus cruelles. Allait-elle, elle, reculer devant cette eau qui semblait si tiède en comparaison ? Bien piètre petite-fille faisait-elle ! Si faible ! Non : la faiblesse était une chose qu'elle ne s'était jamais permise, jamais. Si son grand-père avait traversé l'Helcaraxë et s'en était sorti vivant, il n'y avait aucune raison pour qu'elle ne réussisse pas à affronter les eaux du Forochel.

De toute sa hauteur, elle se redressa. Avec lenteur, elle se débarrassa de son équipement, de ses armes jusqu'à son armure, et du reste de ses vêtements, qui, doucement, tombaient sur la glace, au fur et à mesure. Cet anneau représentait trop pour elle pour qu'elle l'abandonnât dans ces eaux de mort. Entièrement nue sous le blizzard, ses cheveux cinglant l'air, elle contempla un instant l'eau, avant d'y plonger, tête la première, toute entière, livrée au froid.


Des milliers d'épines la transpercèrent de part en part : c'était la sensation que lui procurait le froid intense de la mer. Elle avait l'impression d'être lacérée entièrement, et pas le moindre centimètre de sa peau n'était épargné. Elle fut un instant engourdie, avant de se remémorer son aïeul et le Chaos des Glaces. Alors elle descendit plus profond encore, retenant sa respiration, et atteint le fond. Ses yeux cherchèrent activement l'objet de sa folie, avant de le repérer : là, à trois mètres, étincelait un éclat circulaire d'argent. Elle prit sur elle et parvint à se saisir de la précieuse bague. Elle remonta alors à la surface, et prit une grande goulée d'air qui lui brûla les poumons. Avec difficulté, elle se jucha sur la glace, à moitié tremblante, à moitié paralysée.

Le blizzard cinglait sa peau nue et si froide qu'elle paraissait givrée. Elle eut de grandes difficultés à se remettre et à atteindre les vêtements. Faradêl s'était extrait de la fourrure, et l'avait attendue, inquiet. Il la réceptionna à grands coups de langue pour la réchauffer. L'Elfe se traîna jusqu'à la cape dans laquelle elle s'enroula, l'esprit et le corps totalement embrumés. Elle ouvrit ses doigts : sur sa paume étincelait l'anneau d'argent. Elle s'empressa de le glisser à nouveau à sa juste place, à son doigt. Faradêl s'activait autour d'elle, lui assénait de grands coups de langues, se blottissait contre elle, tentant de la réchauffer coûte que coûte. Tâchant de puiser dans ses réserves d'énergie, elle enfila un à un ses vêtements, et s'enroula au plus possible dans sa cape.

La nuit tomba et le blizzard avec lorsque Laegwing émergea de sa torpeur, le loup serré contre elle. Son cœur s'était vidé : plus rien ne l'attendait ici. Pour le moment, elle ne cherchait même pas à découvrir la raison du voyage des siens sur ce bateau. Elle voulait juste rentrer, et serrer ses enfants contre elle. Son âme brûlait tant de ce désir qu'elle eût la force de se relever. La brume elle-même se dissipa, dévoilant les pâles étoiles. Elle les fixa, et de tout son cœur s'en remit à elles pour son retour, les priant silencieusement de la ramener vers sa tendre progéniture qui lui manquait cruellement, à cet instant plus que jamais.

Elle contempla une dernière fois la mer, et eût un éclair de certitude : elle ne lui offrirait rien d'autre que des promesses funestes. Elle s'en détourna vivement, et, d'un pas mal assuré, fit demi-tour, son loup au talon.

C'est de cette démarche brisée, vide, mal assurée, qu'elle traversa les neiges du Forochel dans le sens inverse. Même la crevasse cruelle n'eût pas le cœur de la tourmenter, et la laissa passer sans broncher. L'esprit embrumé, elle ne voyait que du blanc.

Tout était blanc... si blanc.

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Message par Laegwing Mer 18 Jan - 16:02

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[HRP*] Les deux dernières parties du récit ont été postées en même temps. Vérifiez que vous n'avez pas raté celle qui précède l'épilogue ^^

_________


Épilogue : le retour



Du voyage de retour, Laegwing ne prêta guère attention. Son corps se déplaçait par automatisme, voyageait sans qu'elle ne s'en rende vraiment compte. Elle se revit traverser les bois gelés de Taur Orthon, et combattre un ouargue qui lui laissa une belle morsure au bras – elle était trop mal en point pour se battre correctement.

La passe menant à l'Evendim lui parut interminable, et c'est avec peine qu'elle émergea sur les terres des Rôdeurs, tièdes et verdoyantes. Les collines lui avaient semblé infranchissables, et les bandits, difficiles à éviter. Elbereth que son esprit était embrumé, et son corps engourdi ! Elle se sentait tellement vide. Malgré tout, le souvenir de ses jumeaux ancré dans son esprit, elle prit sur elle pour continuer sa route. C'est au plus profond d'une nuit sans lune qu'elle traversa en amples foulées le grand pont qui enjambait le Baranduin, si vite et si discrètement que les Rôdeurs ne la remarquèrent même pas, et c'était ce qu'elle voulait. Par chance, Ilsaiel ne semblait pas se trouver là – elle l'aurait sans aucun doute repérée.

Les plages du Barandalf la virent s'effondrer sur le sable, et se reposer douze heures durant. Son esprit consumait son corps, elle n'arrivait plus à agir correctement avec celui-ci. Seul le souvenir de ses enfants le maintenait en état d'avancer – ainsi continua-t-elle à le faire.

Les lieues se succédaient, les unes après les autres. Les contrées verdoyantes de la Comté lui permirent de souffler un peu sans avoir à se soucier des dangers environnants. Un hobbit la surprit et s'enfuit en hurlant en voyant le grand loup qui l'accompagnait. Elle franchit le gué sans trop d'encombres, avant d'atterrir en Pays de Bree, terre qu'elle redoutait. Elle du faire à nouveau appel à l'énergie qui lui restait pour éviter au mieux les voyageurs indésirables. Elle voulut faire escale en Vieille Forêt, et se ressourcer à la cascade qu'affectionnait la mystérieuse Baie d'Or, mais préféra continuer sa route pour arriver au plus vite à Imladris. Et retrouver ses enfants, ses enfants qu'elle aimait tant.

Contournant la ville de Bree par le sud, elle s'arrêta tout de même de nombreuses heures au bosquet ancien auquel elle vouait un grand amour. Les vieux arbres la régénérèrent quelque peu, et lui donnèrent la force de persévérer.

Elle n'eût pas le courage de traverser les marais, et préféra emprunter la grand'route. Le voyage en Terres Solitaires fut des plus difficiles : la soif les tenaillait comme à l'aller. Elle n'eût pas d'autre choix que de faire un détour jusqu'au Mont Solitaire, majestueux comme à son habitude, pour faire une halte à sa petite source à ses racines. La suite fut plus ardue, et elle dû presser le pas, au plus vite qu'elle put se le permettre, jusqu'à la Mitheithel, au bord de laquelle tant elle que Faradêl s'effondrèrent pour boire tout leur saoul.

Le Dernier Pont accueillit un soupir de soulagement : la Trouée des Trolls constituait l'ultime ligne droite de son voyage de retour. Elle dû fuir un troll qu'elle n'avait pas la force de combattre. Jusqu'au gué de la Bruinen, et excepté le troll, le trajet se passa relativement bien ; le calvaire de Laegwing débuta à l'ascension du col. Les maigres forces qui lui restaient la faisaient peiner, peiner comme elle n'avait jamais peiné. Elle se sentait tellement faible d'être ainsi démunie. Elle n'aimait pas ça du tout.

Des sentinelles médusées accueillirent au sommet du col la sylvaine mal en point. Elle était finalement parvenue au refuge. Elle allait pouvoir retrouver ses enfants, les serrer contre elle, les inonder de tout l'amour qu'elle ne pouvait plus offrir à quiconque. Laisser derrière elle tout ce blanc, ce gris et ce noir, et contempler les étoiles – enfin.



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[HRP*] Ainsi s'achève ce long récit, de près de soixante-dix pages Open Office... merci beaucoup à tous ceux qui l'auront suivi, et encore plus à ceux dont les commentaires m'ont fait chaud au cœur. Sur ce, j'annonce le retour de Laegwing en RP.

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